À l'exemple des fonctionnaires fédéraux, les cadres supérieurs des commissions scolaires ont aussi droit à un dédommagement s'ils quittent leur organisation pour occuper un meilleur emploi ailleurs, a appris La Presse Affaires.

Plus précisément, le directeur général et son adjoint, lorsqu'ils démissionnent, sont admissibles «à une indemnité de départ égale à un mois de traitement par année de service à l'emploi de la commission scolaire jusqu'à concurrence de six mois», est-il indiqué dans le document consolidé des conditions de travail des directeurs généraux et des directeurs généraux adjoints.

 

Dans le secteur privé, une telle indemnité de départ suscite l'étonnement, surtout à l'aube de la pénurie de main-d'oeuvre attribuable au vieillissement de la population. Normalement, un employé est dédommagé s'il est forcé de quitter son emploi et non s'il part par lui-même pour de meilleurs cieux. Dédommager quelqu'un qui démissionne est l'équivalent de le motiver à partir, disent les experts en rémunération.

Ces derniers jours, La Presse Affaires a appris que tous les employés permanents de la fonction publique fédérale ont droit à une telle indemnité, cadres comme syndiqués.

Au moins 180 000 personnes pourraient donc, en théorie, bénéficier d'une compensation si elles trouvent un meilleur emploi dans le privé ou dans l'appareil gouvernemental municipal ou provincial.

Au Québec, les cas les plus éloquents ont été trouvés dans les contrats d'embauche des PDG d'Hydro-Québec, de la Caisse de dépôt, de la SGF et de la SAQ, où le dédommagement se chiffre en centaines de milliers de dollars.

72 commissions scolaires

Le Québec compte 72 commissions scolaires et autant de directeurs généraux et d'adjoints. Leurs salaires varient de 62 837$ à 156 205$, en plus de primes allant jusqu'à 6%. Leurs mandats couvrent généralement une période d'un an à cinq ans, nous indique-t-on à l'Association des directeurs généraux de commissions scolaires du Québec (ADIGECS).

En cas de démission, le dédommagement de six mois oscillerait donc entre 31 400$ et 78 100$.

Leur indemnité de départ en cas de démission n'est cependant pas versée inconditionnellement. D'abord, le titulaire doit avoir effectué deux ans de service. Ensuite, elle ne s'applique pas si le cadre est engagé par un organisme du secteur public ou parapublic ou s'il est sur le point de prendre sa retraite. Enfin, dans le cas d'un cadre supérieur qui a déjà reçu une indemnité pour démission, la nouvelle indemnité est réduite de la somme déjà reçue.

Un environnement politique

Normand Lapointe, directeur de l'ADIGECS, défend les conditions de travail de ses membres. D'abord, rappelle-t-il, le job de DG a comme facteur majeur d'évoluer dans un environnement politique. Un patron de commission scolaire peut déplaire à une nouvelle équipe élue dans les élections scolaires.

«Un directeur qui n'a plus la confiance du conseil d'administration peut être incité à démissionner. Son départ est volontaire, mais jusqu'à quel point?» fait valoir M. Lapointe.

Précisons néanmoins qu'une clause du contrat d'embauche prévoit spécifiquement qu'une commission scolaire qui résilie le mandat de son DG doit lui offrir un emploi compatible avec ses compétences. Un DG peut même redevenir enseignant, à sa demande. S'il renonce à de telles offres et démissionne, son indemnité est plus généreuse et peut équivaloir à un maximum de 12 mois, plutôt que six mois pour une démission «volontaire».

Normand Lapointe soutient que la proportion de DG qui quittent leur emploi de leur plein gré est très faible. La raison est simple, fait-il valoir: il y a peu de postes de cadres supérieurs dans les commissions scolaires. «Les gens font habituellement leur vie dans le même réseau scolaire», dit-il.

La Presse Affaires a vérifié les conditions de travail des cégeps, mais a constaté que les dirigeants ne bénéficient pas d'un dédommagement s'ils quittent volontairement leur organisation.

Réjean Parent, président de la CSQ, principal syndicat d'enseignants au Québec, croit qu'une indemnité ne devrait être versée que si le départ profite d'une façon ou d'une autre à l'employeur. C'est le cas, par exemple, lorsque le personnel d'encadrement est trop nombreux.

«Une personne qui quitte devrait avoir les mêmes droits, qu'elle soit enseignante ou cadre. Il ne devrait pas y a voir d'indemnité à moins que le départ solutionne un problème de surplus de personnel», dit essentiellement M. Parent.

Le syndicaliste se porte néanmoins à la défense d'Henri-Paul Rousseau, ex-PDG de la Caisse de dépôt. Selon M. Parent, l'indemnité de départ de 378 750$ qu'il a reçue l'an dernier est plus justifiable dans la mesure où elle était une façon d'offrir au gestionnaire un forfait de rémunération concurrentiel au secteur privé.

Dans le cas des directeurs généraux de commissions scolaires, toutefois, cet élément de concurrence n'est pas présent et l'indemnité n'est donc pas admissible, croit-il.