Les constructeurs automobiles, très empressés à donner des gages de bonne volonté à Donald Trump en annonçant des investissements aux États-Unis, cherchent surtout à éviter l'imposition de taxes sur les importations mexicaines qui réduiraient leurs bénéfices, selon des experts.

Avant même la prestation de serment, M. Trump a déjà mis une forte pression sur les industriels pour qu'ils rapatrient leur production sur le sol américain. General Motors (GM), Ford et Fiat Chrysler ont à tour de rôle annoncé des milliards de dollars d'investissements et la création de milliers d'emplois supplémentaires aux États-Unis.

Les constructeurs asiatiques Toyota, Nissan, Hyundai, Kia, présents sur le marché américain, leur ont emboîté le pas, tandis que l'allemand Volkswagen s'est engagé à construire des voitures électriques aux États-Unis.

«D'un point de vue relations publiques, il était très important de faire ces annonces pour rappeler au grand public que la majorité de leurs usines [en Amérique du Nord] sont aux États-Unis au moment où on entend partout une rhétorique anti-délocalisation», estime Maryann Keller du cabinet MK&A.

L'industrie automobile est, selon elle, «sous les feux des projecteurs sur le fait qu'elle ne crée suffisamment pas d'emplois américains et n'investit pas assez ici. Elle veut donc montrer qu'elle fait sa part pour préserver les emplois».

«C'est du gagnant gagnant», renchérit Rebecca Lindland chez Kelley Blue Book.

Victoires symboliques

Les constructeurs automobiles espèrent qu'en octroyant des victoires symboliques et médiatiques à Donald Trump, ils peuvent réussir à le convaincre de ne pas mettre à exécution sa menace d'imposer une taxe de 35% sur les importations mexicaines, qui affecterait leurs marges à moins de la répercuter au consommateur en augmentant les prix des voitures.

«Le gros avantage de ces annonces, c'est qu'elles dégonflent la menace d'imposer des taxes», estime Rebecca Lindland.

Lors de la dernière décennie, les grands groupes automobiles ont transféré au Mexique la production des petites voitures aux marges faibles afin de tirer profit de coûts de fabrication bas et d'une main-d'oeuvre bon marché. L'ouvrier automobile mexicain gagne par heure seulement le cinquième de ce que perçoit son homologue américain, affirme Maryann Keller.

En conséquence, l'impact de nouvelles taxes douanières risque de mettre fin à cet avantage et de rogner les bénéfices.

C'est le cas pour Ford, qui a fabriqué 433 000 véhicules au Mexique en 2015, soit 14% de sa production nord-américaine, et devrait dégager 21 milliards de dollars de revenus dans cette région en 2016, selon le cabinet Trefis.

«Si nous partons d'une hypothèse conservatrice stipulant qu'au moins 20% de ces revenus proviennent des voitures produites au Mexique, vu que le pays représente 14% de la production totale de Ford, ça ferait environ 4 milliards de dollars, calcule Trefis. Une taxe douanière de 35% amputerait 1,4 milliard de dollars de cette somme, soit environ un tiers des 3,72 milliards de dollars de bénéfices nets que Ford devrait dégager en 2016.»

Et de conclure que ceci mettrait dans une «position difficile» le deuxième constructeur américain, qui va produire désormais au Mexique ses modèles Focus, Fusion et Fiesta vendues aux États-Unis afin de réduire leur coût de fabrication.

Boudées par les consommateurs américains qui leur préfèrent des 4X4 de ville (SUV) et pickups (camionnettes à plateau) à l'heure de l'essence pas chère, les petites voitures ont vu leurs ventes baisser de 7,5% aux États-Unis en 2016, alors que les constructeurs ont vendu dans l'ensemble un nombre record de voitures.