Un an après le début de l'affaire Volkswagen, la facture sera salée pour les constructeurs automobiles, éclaboussés par le scandale ou non, mais contraints d'appliquer davantage à la lettre une réglementation antipollution européenne qui va se durcir.

Cette thématique, et l'avenir «en pointillé» du diesel, devraient dominer les conversations avec les patrons de fabricants de voitures, réunis jeudi à Paris pour l'ouverture des journées professionnelles du Mondial de l'automobile, avant que le public soit admis à partir de samedi.

Depuis que Volkswagen a avoué il y a un an avoir truqué 11 millions de véhicules diesel pour les faire passer pour plus propres qu'ils n'étaient, le secteur tout entier s'est crispé, tant les enjeux sont considérables.

«Une des conséquences claires de cette affaire, c'est que le régulateur, les États, les pouvoirs publics, veulent changer les méthodes d'évaluation, les critères seront de toute façon de plus en plus restrictifs, et notamment les normes en matière de polluants, et ça va nécessiter d'investir beaucoup», remarque Flavien Neuvy, responsable de l'Observatoire Cetelem de l'automobile.

Alors que les procédures et les pénalités pleuvaient sur le géant de Wolfsburg, certains groupes automobiles ont donné des gages de sincérité, tel PSA qui a publié des consommations en «conditions réelles d'utilisation», d'autres fait leur aggiornamento comme Renault avec un plan d'action industriel.

Le «dieselgate» a en effet attiré l'attention sur ce que des associations de défense de l'environnement clamaient de longue date: en Europe, les mesures d'émissions d'oxydes d'azote (NOx) et de CO2 lors du processus d'homologation n'ont pas grand-chose à voir avec les conditions réelles d'utilisation.

Le scandale «n'éclabousse pas seulement les constructeurs, il éclabousse aussi le régulateur européen qui a été défaillant», indique à l'AFP la députée PS des Deux-Sèvres Delphine Batho, rapporteuse d'une mission d'information parlementaire sur l'automobile qui doit rendre ses propositions à la mi-octobre.

Les autorités européennes ont réagi. De nouvelles normes dites «Euro 6d» incluant des tests en conditions réelles et plus seulement en laboratoire doivent entrer en vigueur en septembre 2017. Des limites et des coefficients de dépassement ont été fixés.

Ces normes «étaient en débat depuis des années et on peut d'ailleurs se demander si elles ne seraient pas encore dans les limbes sans l'affaire Volkswagen», observe Mme Batho.

«Défi majeur»

De son côté, une commission installée par le gouvernement a dit en juillet ne pas pouvoir exclure que d'autres marques que celles de Volkswagen aient recours à des logiciels «tricheurs», malgré leurs dénégations, une proportion importante des 85 véhicules diesel qu'elle a testés présentant des résultats «en anomalie».

Ces travaux ont montré que la technologie du «piège à NOx» qui détruit ces émissions nocives par combustion était globalement moins efficace en conditions réelles que celle par injection d'urée (SCR), plus complexe.

«Il est clair que tous les constructeurs vont devoir s'approcher de la technologie SCR qui est coûteuse, certains l'utilisent déjà, d'autres non, donc il y aura des conséquences en terme de rentabilité», commente Yann Lacroix, expert du secteur automobile chez l'assureur Euler Hermes.

«L'avenir du diesel dans tout cela s'inscrit en pointillé (...) avec des prix qui vont s'harmoniser et des systèmes de dépollution qui coûtent plus cher. C'est un défi majeur» , selon M. Neuvy.

Le gouvernement a promis de resserrer progressivement la fiscalité entre l'essence et le diesel, déjà redescendu à 52,7% des immatriculations neuves françaises depuis le début de l'année contre 63,9% en 2014.

Autre nuage à l'horizon pour l'industrie: alors que la Répression des fraudes enquête au-delà de Volkswagen, dont le dossier a déjà été transmis au Parquet, le secrétaire d'État au Budget Christian Eckert a prévenu que le gouvernement chercherait à obtenir compensation d'un éventuel «manque à gagner fiscal» sur les bonus et malus écologiques.

En attendant, c'est l'image du secteur tout entier qui a été abîmée: selon l'Argus cette semaine, 67% des 2266 automobilistes français ayant répondu à un sondage via son site internet disent penser que «tous les constructeurs trichent» sur les émissions de leurs voitures.