Les premiers cas de blocage de pédale d'accélérateur connus par Toyota remontent à trois ans, au printemps 2007, a confirmé l'un de ses hauts dirigeants, hier, devant la presse financière au Japon.

Mais parce que ces premiers cas et les suivants n'impliquaient que certains véhicules, notamment la camionnette pleine grandeur Tundra en Amérique du Nord et une version européenne de la petite Yaris, Toyota s'en est tenu à des correctifs au cas par cas.

Le constructeur remplaçait une pièce de friction dans le mécanisme de la pédale d'accélérateur, dont la version d'origine s'était avérée vulnérable à un blocage par l'infiltration d'humidité.

Mais l'automne dernier, Toyota a soudainement vu se multiplier les blocages de pédale d'accélérateur rapportés par son réseau de concessionnaires et les autorités routières, en Europe et en Amérique du Nord.

Au Canada seulement, au moins cinq cas de pédale bloquée ont été signalés depuis novembre dernier, confirme-t-on chez Toyota Canada.

N'empêche, ce n'est qu'à la suite de requêtes insistantes de l'Agence américaine de la sécurité routière (NHSTA) que Toyota a envisagé un rappel massif de véhicules, selon son vice-président à la direction, Shinichi Sasaki.

«Il y a eu un délai pour l'annonce du rappel et des mesures correctrices», a admis M. Sasaki, au cours d'un point de presse à Tokyo.

Pendant ce temps, aux États-Unis, des propos du Secrétaire fédéral des Transports, Ray LaHood, ont ajouté aux soupçons de laxisme chez Toyota.

«La raison qui a décidé Toyota à faire le rappel et interrompre la construction de certains véhicules, c'est parce que mon département lui a demandé, a soutenu le secrétaire LaHood en entrevue à l'agence Associated Press.

«Ce sont les gens du département des Transports, en particulier nos experts en sécurité routière, qui ont confronté Toyota pour l'inciter à faire le rappel de véhicules. Nous avons même dû nous rendre au siège social, au Japon, parce que la filiale américaine faisait la sourde oreille à nos doléances.»

Sur cette lancée, un dirigeant de l'agence NHSTA a indiqué qu'elle envisageait des fortes amendes contre Toyota pour sa gestion du rappel de véhicules.

Les dirigeants de Toyota sont d'ailleurs convoqués à comparaître devant au moins deux comités du Congrès, les 10 et 25 février prochains.

Par ailleurs, l'agence NHSTA poursuit une enquête sur les contrôleurs électroniques d'accélérateur des véhicules Toyota, soupçonnés d'avoir provoqué des nombreux cas d'accélération involontaire et d'accident mortel depuis quelques années.

Pour le moment, toutefois, cette autre faille alléguée des véhicules Toyota - vulnérabilité des contrôleurs aux interférences radio externes - demeure distincte du rappel courant de véhicules, qui vise un défaut mécanique des pédales d'accélération.

Entre-temps, les conséquences financières et commerciales de cette crise chez Toyota amplifient déjà à vue d'oeil.

Pour les coûts immédiats, la facture des frais de rappel et des ventes perdues approcherait déjà les 2 milliards de dollars, selon des estimations d'analystes.

Quant aux ventes de véhicules Toyota, les derniers chiffres de l'industrie automobile, annoncés hier, montrent une chute de 16% aux États-Unis, et de 10% au Canada.

Ces baisses sont à contre-courant des regains signalés dans ces deux marchés, et parmi tous les principaux concurrents de Toyota.

La chute des ventes de Toyota à court terme est d'autant plus considérable que son rappel et son arrêt de vente de véhicules ne sont intervenus que durant les 10 derniers jours du mois de janvier.

Quant au déroulement du rappel commencé par Toyota en Amérique du Nord il y a 10 jours, il implique maintenant plus de huit millions de véhicules vendus dans les principaux marchés du monde.

Au Canada, le rappel implique quelque 270 000 véhicules de modèles divers - 83 000 au Québec - et vendus depuis 2005, dans certains cas.

S'ajoutent plusieurs milliers d'exemplaires de la Pontiac Vibe vendus par les concessionnaires GM, qui est la jumelle de la Toyota Matrix.

Aux dernières informations, l'organisation de ce rappel d'une ampleur sans précédent s'effectue en urgence dans toute l'organisation Toyota et parmi son vaste réseau de concessionnaires.

Au Québec, les 68 concessionnaires attendent d'une journée à l'autre la réception des pièces promises par Toyota pour réparer la pédale d'accélération dans des dizaines de milliers de véhicules. Ces installations devraient commencer la semaine prochaine et durer plusieurs semaines, après que les clients de Toyota aient été avertis par lettre individuelle.