Le volte-face de l'américain General Motors, qui a décidé de garder Opel dans son giron, alarmait mercredi les salariés allemands et provoquait la colère des responsables politiques qui avaient soutenu un rachat par le canadien Magna.

«Le comportement de General Motors est absolument inacceptable», en particulier «vis-à-vis des salariés à huit semaines de Noël», a jugé le ministre fédéral de l'Economie Rainer Brüderle, qui veut désormais récupérer un crédit de 1,5 milliard d'euros accordé par l'Etat fédéral à GM pour maintenir Opel à flot.

Cela «montre le visage haïssable du capitalisme moderne», s'est emporté Jürgen Rüttgers, chef du gouvernement conservateur (CDU) du Land de Rhénanie-du-Nord/Westphalie où se trouve l'usine de Bochum.

Les syndicats s'inquiètent du sort des quelque 55 000 salariés européens de GM, dont la moitié en Allemagne. GM n'a pas encore dévoilé ses intentions, mais évalué à 3 milliards d'euros le coût de la restructuration qu'il envisage.

Des rassemblements sont prévus jeudi sur tous les sites allemands et doivent ensuite s'étendre. IG Metall, qui avait signé mardi des concessions salariales en vue d'un rachat par Magna, les a jugées mercredi caduques.

Le puissant syndicat allemand a pris soin de préciser qu'il se battait «pour l'avenir de tous les sites européens». Berlin était soupçonné par les Etats européens abritant des usines Opel d'avoir désigné Magna comme repreneur car il prévoyait le maintien des quatre sites allemands.

De fait, la surprise semble générale dans les autres capitales européennes, mais les réactions sont beaucoup plus nuancées. Le ministre polonais de l'Economie Waldemar Pawlak s'est félicité des «perspectives désormais largement meilleures (pour l'usine polonaise de GM Europe), car le propriétaire américain en apprécie l'efficacité».

Les Britanniques ont annoncé «vouloir travailler étroitement avec GM», et n'ont pas exclu d'injecter de l'argent dans une restructuration. Le Royaume-Uni compte 4.700 salariés de GM Europe, dans deux usines Vauxhall, la marque jumelle d'Opel.

Le plus grand syndicat du pays, Unite, a salué «une décision fantastique».

Le chef du gouvernement flamand de Belgique Kris Peeters, a pris acte de la volte-face de General Motors, et rappelé que le plan de restructuration prévu par Magna «n'était pas bon pour (le site de production d')Anvers» puisqu'il envisageait sa fermeture.

L'Espagne s'est dite «surprise», par la voix de son ministre de l'Industrie  Miguel Sebastian, mais prête à négocier avec General Motors.

L'étonnement régnait aussi en Russie. Le pays n'accueille pas de site de production, mais la banque semi-publique Sberbank était le partenaire financier de Magna dans cette opération. Les partenaires vont procéder à une «analyse juridique» de la décision, a déclaré le porte-parole du Premier ministre Vladimir Poutine.

Le gouvernement américain a affirmé n'être pour rien dans la décision de GM, annoncée le jour même d'une visite à Washington de Mme Merkel, qui avait fortement fait pression pour une vente d'Opel à Magna. L'Etat américain détient plus de 60% du capital de GM mais assure régulièrement ne pas s'immiscer dans la gestion quotidienne de l'entreprise.

Si Berlin considère la décision de GM comme «définitive», il a néanmoins l'intention de demander quelques clarifications à Washington. «Je peux m'imaginer qu'il y ait un contact» entre Mme Merkel et le président américain Barack Obama, a indiqué le porte-parole du gouvernement Ulrich Wilhelm.

Arguant d'un environnement des affaires en Europe «amélioré», d'une meilleure «santé financière» et de «l'importance d'Opel/Vauxhall» pour sa stratégie internationale, GM avait expliqué avoir finalement décidé de conserver Opel après des mois de négociations avec le consortium Magna/Sberbank.