L'Allemagne pourrait être enfin fixée jeudi sur le sort réservé à Opel, alors que les salariés redoutent le maintien du constructeur automobile dans le giron de General Motors probablement synonyme de fermetures de sites.

Un tel scénario serait une humiliation pour le gouvernement allemand et pourrait être politiquement coûteux à 17 jours des législatives, tant pour la chancelière conservatrice Angela Merkel que pour son challenger social-démocrate (SPD), le ministre des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier: tous deux se sont publiquement engagés à sauver Opel et ses sites en Allemagne.

Le négociateur du groupe américain John Smith devait se rendre dans la journée à Berlin pour informer le gouvernement des délibérations du conseil d'administration de GM, qui a duré deux jours, selon des sources proches du dossier.

Le silence radio régnait sur la nature de la décision de GM. «S'il y a quelque chose à annoncer, nous le ferons en temps et en heure», ont indiqué GM et Opel dans un bref communiqué.

La tenue dans l'après-midi à Berlin d'une conférence de presse, annoncée de sources officieuses et appuyée par le chef du comité d'entreprise d'Opel Franz Klaus, constitue une spéculation des médias à laquelle les groupes n'entendent pas participer, poursuivent-ils.

Qu'à cela ne tienne, le très loquace chef du CE a déjà menacé d'une journée massive de protestation vendredi.

«Nous connaissons le plan "Viability" de GM», qui prévoit la vente ou la fermeture des sites d'Anvers (Belgique), Eisenach et Bochum dans le cas d'un maintien d'Opel dans GM, a déclaré Klaus Franz sur la télévision publique ZDF, qui dit craindre «une orgie de réductions de coûts».

Opel et sa jumelle britannique Vauxhall emploient près de 50.000 personnes en Europe, dont la moitié en Allemagne.

Le gouvernement de Berlin soutient toujours officiellement l'offre de l'équipementier canadien Magna, adossé à la banque russe Sberbank, qui a promis de garder les quatre sites du pays. Mais GM n'en veut plus, notamment à cause du transfert de technologie vers la Russie qu'impliquerait cette vente à laquelle il a pourtant donné son accord en mai.

Le géant de Detroit veut consulter d'abord la société fiduciaire allemande qui gère actuellement Opel et le gouvernement avant de rendre toute information publique, vraisemblablement dans l'après-midi, selon le ministère de l'Economie.

Le feuilleton Opel, lourdement politisé et médiatisé, tient l'Allemagne en haleine depuis de longs mois. L'opinion publique allemande considère comme sienne la marque à l'éclair bien qu'elle soit depuis 80 ans dans le giron de GM.

Pendant longtemps, sa vente par sa maison mère, qui a frôlé la faillite, semblait acquise. Outre le couple Magna/Sberbank, l'autre candidat à la reprise est l'investisseur financier belge RHJ International.

Mais General Motors, qui a bénéficié d'un processus éclair de faillite qui lui a permis d'assainir ses finances, a fait comprendre qu'il pourrait finalement garder Opel et Vauxhall, garantes de l'accès au marché européen et du développement de petites voitures moins polluantes.

GM s'était résolu «contraint et forcé à se séparer d'Opel car le gouvernement américain n'avait jusqu'ici pas autorisé que l'argent des contribuables soit utilisé pour une restructuration hors des Etats-Unis», explique le président de GM-Europe Carl-Peter Forster dans un entretien au magazine spécialisé Auto Motor und Sport.

Le ministre allemand des Finances social-démocrate n'a pas caché son irritation. Si GM choisit de conserver Opel, «il devra rembourser le 1,5 milliard d'euros» accordé au constructeur allemand par le gouvernement, a averti Peer Steinbrück dans une interview au Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Pas question que les milliards d'euros promis par Berlin en cas de rachat par Magna servent «pour un plan de fermeture en Allemagne», s'est emporté le ministre.