Posséder sa propre compagnie automobile. Pour un homme qui a fait sa fortune à fabriquer des pièces d'auto, c'est un rêve tout désigné.

Frank Stronach a bien failli réaliser son rêve à la fin des années 70. Il avait même préparé un prototype - une sorte de véhicule utilitaire sport (SUV) avant son temps. «Il l'avait même montré à plusieurs personnes, mais elles lui ont dit de laisser tomber son projet car il se serait mis en concurrence contre ses propres clients», dit l'analyste boursier David Tyerman, qui suit les activités de Frank Stronach et Magna International pour le compte de la firme Genuity Capital.

Trois décennies plus tard, le magnat de Magna International profite de la crise secouant l'industrie automobile pour réaliser son vieux rêve. Au terme de négociations serrées avec le gouvernement allemand, Frank Stronach vient d'acquérir 20% du constructeur Opel.

Une victoire personnelle pour le grand patron de Magna, qui a quitté son Autriche natale pour le Canada à l'âge de 22 ans, au début des années 50. Dans ses bagages lors de son premier voyage outre-mer? 200 dollars et son diplôme de machiniste.

Au Canada, Frank Stronach s'est bâti une fortune de 800 millions en produisant des pièces d'auto. Beaucoup de pièces d'auto. Fondé dans un garage de Toronto en 1957, Magna International est aujourd'hui troisième fournisseur de pièces d'auto du monde.

Pendant ses trois premières années, l'entreprise de Frank Stronach n'était qu'un garage comptant sur les services d'un seul mécanicien. Chiffre d'affaires la première année: 13 000$. On est loin de l'empire qui génère 23 milliards de chiffre d'affaires et qui vaut plus de 4 milliards à la Bourse de Toronto (sans compter les actions à la Bourse de New York qui valent environ 55 millions).

Premier contrat

En 1960, Magna obtient un premier contrat de pièces d'un constructeur automobile. Ironiquement, le contrat sera accordé par GM, la même entreprise qui lui vendra 39 ans plus tard le constructeur automobile Opel, tout juste avant de se mettre à l'abri de ses créanciers.

Inscrite à la Bourse de Toronto depuis 1962, la société ontarienne connaîtra deux décennies de croissance ininterrompue durant les années 70 et 80. Puis, au début des années 90, Magna vient près de disparaître, incapable de gérer sa croissance. En novembre 1990, le titre de Magna International a descendu sous la barre des 2$ à la Bourse de New York (il valait 17,25$ un an plus tard).

«L'entreprise était au bord de la faillite, se rappelle l'analyste boursier David Tyerman. Elle avait trop de contrats et trop de dettes. Grâce à l'aide des banques, l'entreprise a pu continuer à fonctionner. Elle a pu renflouer ses coffres quand elle a terminé d'exécuter tous ses nouveaux contrats.»

David Tyerman attribue les succès de Magna International à un principe de gestion qui fait partie de l'ADN de l'entreprise: la décentralisation. «Chez Magna, tous les directeurs d'usines ont des bonis reliés à la performance de leur usine, dit-il. Ils ont donc intérêt à ce qu'elles fonctionnent bien.» Magna a aussi réussi à tirer profit des avancées technologiques dans l'industrie automobile. Notamment le siège pour enfants, codéveloppé et commercialisé par Magna dans les années 80.

Les années 90 seront celles de l'expansion européenne - Frank Stronach est d'ailleurs retourné vivre en Autriche, d'où il dirige son conglomérat. En 2001, Magna acquiert des usines d'assemblage. Ne restait plus que devenir propriétaire d'un constructeur automobile. La première tentative, avec Chrysler en 2007, a échoué. La deuxième tentative, avec Opel, semble être la bonne.

 

UN GÉANT DE L'AUTO

Magna International est actif dans plusieurs secteurs de l'automobile. Voici un portrait :

> Fabrication de pièces et de composants, incluant des sièges, des portes et des systèmes électroniques ;

> Ingénierie et design;

> Assemblage de véhicules pour des constructeurs, dont Mercedez-Benz ;

> Le groupe emploie 74 000 travailleurs dans 25 pays ;

> Profit de 78 millions US, en 2008, et des revenus de 23,7 milliards US