Des producteurs de fruits canadiens craignent que les produits américains destinés à la Chine soient redirigés au Canada et inondent leur marché en raison de l'imposition de nouveaux tarifs chinois.

Selon la directrice générale de l'association des pomiculteurs ontariens Ontario Apple Growers, Kelly Ciceran, les tarifs de 15 % imposés par les Chinois sur les pommes, cerises, pêches, framboises et canneberges américaines vont vraisemblablement faire grimper la quantité de fruits américains livrés au Canada, ce qui devrait exercer une pression à la baisse sur les prix des grossistes.

Le gouvernement chinois a annoncé lundi l'imposition de tarifs allant de 15 % à 25 % sur 128 produits américains - incluant des fruits, des noix, le porc, le vin, les tuyaux en acier et les résidus d'aluminium - en représailles aux tarifs américains sur les importations d'acier et d'aluminium, estimés à 3 milliards US.

«Nous redoutons surtout qu'une augmentation de la quantité de produits qui pourront être vendus au Canada fasse croître la pression sur les prix du marché canadien», a-t-elle expliqué.

Mme Ciceran estime que les prix dépendront de la proportion des économies que les détaillants choisiront de retransmettre aux consommateurs.

Karl Little, du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), estime qu'un long conflit commercial forcerait les plus grandes chaînes de supermarchés du Canada à retransmettre la plupart des baisses de prix à leurs consommateurs en raison de la féroce concurrence de leur industrie.

Selon le vice-président des affaires publiques du CCCD, les cultivateurs américains à la recherche de solutions de rechange pour leurs exportations chinoises devraient se tourner vers leur voisin nordique en raison des questions logistiques liées au transport, plus simples.

Mais l'économiste en chef d'Exportation et développement Canada, Peter Hall, souligne que le Canada est un marché relativement petit pour absorber les volumes destinés à la Chine. Selon lui, les tarifs pourraient représenter une occasion, pour le Canada, d'exporter davantage de biens en Chine, où la demande est en croissance pour certains produits comme le porc.

Le chef de la direction de la Winery and Grower Alliance of Ontario, Aaron Dobbin, croit que la situation pourrait représenter l'occasion, pour certains vins canadiens, d'être vendus en Chine, mais davantage de vin américain pourrait aussi être livré au Canada.

Selon M. Dobbin, les États-Unis affichent un excédent commercial de 450 millions avec le Canada pour ce qui est du vin, et ils sont toujours prêts à faire grimper leur part du marché.

«Cela nous inquiète toujours», a-t-il indiqué au sujet d'une hausse des exportations américaines. «Nous sommes en concurrence avec les Américains essentiellement depuis l'entente originale de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), alors le fait de leur livrer concurrence sur le marché national n'est pas quelque chose de nouveau pour nous.»

Les producteurs du Conseil canadiens du porc ne s'attendent pas à ce que les tarifs chinois de 25 % aient un grand impact parce que le porc est largement disponible partout dans le monde.

Le directeur exécutif du conseil, John Ross, croit que les tarifs pourraient modifier certaines relations commerciales, mais cela ne devrait pas avoir d'impact sur les prix.

«En raison de la façon dont les marchés canadien et américain sont intégrés, nous ne voyons pas beaucoup de grandes occasions se présenter à cause des changements de tarifs qui affectent les États-Unis.»

Il ajoute que le porc frais n'est actuellement pas admis en Chine et que certaines des coupes de viande préférées dans ce pays, comme les pieds de cochon, ne sont pas très populaires auprès des consommateurs canadiens.