Les deux principaux géants de la bière, SABMiller et AB InBev, ont conclu un accord de principe prévoyant le rachat du premier par le second pour une somme avoisinant les 69 milliards de livres britanniques (106 milliards de dollars US), une des plus grandes opérations d'acquisition de l'histoire des entreprises.

Si la transaction va au bout, elle constituera la troisième plus importante jamais enregistrée tous secteurs confondus, d'après le cabinet Dealogic, et mariera les marques de bière américaine Budweiser et belge Stella Artois du belgo-brésilien AB InBev avec les italienne Peroni, tchèque Pilsner Urquell et néerlandaise Grolsch du britannique SABMiller.

Le colosse issu de cette acquisition monumentale brassera près de 60 milliards de litres par an, soit trois fois plus que l'actuel troisième du secteur, le néerlandais Heineken. Il vendra près d'une bière sur trois dans le monde, de la mexicaine Corona (hors États-Unis) à l'australienne Foster's en passant par la chinoise Snow - la marque la plus écoulée sur la planète -, bien que l'opération doive auparavant obtenir le feu vert des autorités de régulation.

AB InBev s'ouvre ainsi entre autres les portes de l'Afrique, un continent où la consommation de petite mousse est très prometteuse et où SABMiller, né il y a 120 ans en Afrique du Sud, est très présent. Arguant de l'intérêt de son investissement il y a quelques jours, il avait souligné que «le groupe combiné opérerait dans presque tous les marchés majeurs de la bière, y compris des régions émergentes clés avec de fortes perspectives de croissance comme l'Afrique, l'Asie, l'Amérique centrale et du sud».

L'analyste Jeremy Cunnington, d'Euromonitor International, a néanmoins noté que les principales opérations d'acquisition possibles dans le secteur étaient désormais bouclées ou sur les rails. «On peut se demander ce que les brasseurs mondiaux vont bien pouvoir faire pour continuer de grandir», s'est-il interrogé.

Il rappelle que les volumes de bière vendus dans le monde ne progressent qu'à pas comptés - juste 1% de hausse attendue ainsi entre 2014 et 2015 -, en raison d'une stagnation sur les marchés développés. Les bières artisanales, qui représentent entre 5 et 9% de la consommation, voient néanmoins leurs ventes bondir de plus de 10% par an sur les marchés les plus avancés.

Montée des enchères

Dans un communiqué commun, AB InBev et SABMiller ont expliqué s'être entendus sur le montant du rachat à l'issue d'un bras de fer d'un mois au cours duquel le conseil d'administration de SABMiller a désapprouvé quatre premières offres informelles, faisant monter les enchères avant de se dire mardi, cette fois, prêt à recommander à l'unanimité la cinquième offre du numéro un de la bière.

Cette dernière prévoit qu'AB InBev verse 44 livres aux actionnaires de SABMiller pour chacun de leur titre, ce qui valorise la capitalisation boursière du groupe basé à Londres à 69 milliards de livres (106 milliards de dollars US). En ajoutant la dette de SABMiller, cette offre en numéraire le valorise même à près de 80 milliards de livres (122 milliards US).

Pour les actionnaires de SABMiller, qui devront se prononcer sur cette offre tout comme leurs homologues d'AB InBev, cette proposition représente une prime de 50% par rapport au cours de l'action SABMiller d'il y a un mois, avant la montée des spéculations sur une possible transaction.

Le titre SABMiller montait fortement de 9,07% à 39,50 livres mardi à la Bourse de Londres, tandis qu'AB InBev grimpait de 1,73% à 100,05 euros à la Bourse de Bruxelles.

L'accord conclu entre les directions des deux groupes prévoit une offre alternative à la proposition en argent, portant sur un maximum de 41% du total des actions de SABMiller. Les actionnaires du groupe britannique qui choisiraient cette alternative se verraient remettre 0,48 action d'AB InBev plus 3,78 livres en numéraire pour chacune de leur action.

AB InBev a jusqu'au 28 octobre à 17h00 GMT pour déposer une offre formelle d'acquisition.