Le système de gestion de l'offre qui fixe les prix des aliments d'origine laitière et avicole au Canada afin de soutenir les revenus des agriculteurs engendre des surcoûts de plusieurs centaines de dollars par an dans le budget des ménages.

De plus, selon une analyse de l'Institut économique de Montréal, réalisée avec l'Université du Manitoba, c'est parmi les ménages ou familles à plus faibles revenus que ces surcoûts alimentaires ont le plus d'impact négatif, lorsque mesuré en fonction de leur niveau de revenus.«Ce système impose un coût additionnel de 554 $ par année ou 0,4% des revenus aux ménages qui comptent parmi les 20 % les plus riches. Par contraste, le fardeau correspondant pour les ménages les plus pauvres (339 $ par année) représente 2,29 % de leurs revenus», lit-on dans l'analyse publiée mercredi par l'Institut économique.

> Consultez le rapport d'analyse de l'Institut économique de Montréal

«La gestion de l'offre touche de façon disproportionnée les Canadiens les plus pauvres, jusqu'à cinq dois plus que les ménages riches. Cette politique est donc fortement régressive envers les ménages à revenus modestes et faibles», soutiennent les co-auteurs de l'analyse, dont Mario Dumais, un ex-économiste et directeur à l'Union des producteurs agricoles et à la Coopérative fédérée.

Dans leur analyse, M. Dumais et Youri Chassin, économiste et directeur de la recherche à l'Institut, rappellent que «l'objectif premier des politiques canadiennes de gestion de l'offre, mises en place dans les secteurs du lait, de la volaille et des oeufs dans les années 1970, était de protéger les agriculteurs des fluctuations de prix.

Ces politiques s'appuient sur trois éléments principales : fixation des prix en fonction des coûts au lieu des marchés, barrières tarifaires élevées contre les importations, quotas de production pour éviter la surproduction qui ferait baisser les prix.

Mais après presque 50 ans de cette gestion de l'offre, les analystes de l'Institut économique constatent que «les bénéficiaires de ces politiques sont les 13 500 producteurs canadiens de lait, de volaille et d'oeufs, qui représentent le huitième (13%) de toutes les fermes au Canada. »

En contrepartie, écrivent-ils, «la gestion de l'offre nuit aux 35 millions de consommateurs canadiens en les forçant à payer systématiquement plus pour ces produits laitiers et avicoles, ainsi que les autres (industries et services alimentaires) qui les utilisent comme ingrédients.»

Pour corriger cette situation, devenue litigieuse aussi entre le Canada et ses partenaires commerciaux, les analystes de l'Institut suggèrent au gouvernement canadien de profiter des négociations entourant «l'Accord de partenariat transpacifique» entre 12 pays pour lancer le «démantèlement» du système de gestion de l'offre, «tout en protégeant les agriculteurs».

À cet effet, écrivent Mario Dumais et Youri Chassin, « le gouvernement fédéral pourrait s'inspirer de l'Australie, qui a éliminé avec succès le système de gestion de l'offre dans son industrie laitière il y a quinze ans."

«Pour aider les producteurs laitiers à s'ajuster, expliquent-ils, le gouvernement australien a racheté leurs quotas de production, une mesure financée par une taxe temporaire de 11 cents sur le prix de détail de chaque litre de lait entre 2000 et 2009.»

Au Canada, concluent-ils, «une solution semblable permettrait de supprimer graduellement la gestion de l'offre en traitant équitablement les producteurs de lait, de volaille et d'oeufs - en particulier ceux qui se sont endettés pour acheter des quotas de production.»