Les dirigeants de Molson Coors (T.TPX.B) devraient en profiter pour se déboucher une bonne bière: ils ont réussi à déjouer les prévisions des analystes en dévoilant hier des résultats meilleurs que prévu. Mais leur répit pourrait être de courte durée, leur entreprise faisant toujours face à des marchés parvenus à maturité.

Le géant du houblon a vendu pour 13,9 millions d'hectolitres de bière au cours du deuxième trimestre de l'année, soit l'équivalent de 371 piscines olympiques. En excluant les éléments inhabituels, qui ont été particulièrement nombreux au cours du trimestre, l'entreprise a pu dégager des profits de 250 millions US, un gain de 12% par rapport à l'an dernier.

«Il s'agit d'un bon trimestre, on ne peut pas leur enlever ça, a dit à La Presse Affaires Brian Yarbrough, un analyste de St-Louis qui travaille pour la firme Edward Jones&Co. Mais je crois qu'il reste beaucoup de défis et de vents de face à affronter. Les marchés sont matures et les croissances sont faibles, alors la partie restera difficile.»

L'action de l'entreprise, qui possède des sièges sociaux à Denver et Montréal, a gagné 1,48$ ou 3,6% hier à Toronto pour clôturer à 42,99$.

Il fallait être à jeun, hier, pour comprendre les résultats particulièrement complexes dévoilés par l'entreprise. L'acquisition du brasseur d'Europe centrale Starbev, conclue le 15 juin dernier pour un prix de 2,7 milliards d'euros, a entraîné des coûts inhabituels qui ont plombé les résultats officiels, ce qui a fait chuter les profits de 54%.

Les ventes de Starbev ont aussi été incluses dans les résultats, mais seulement pour deux semaines, ce qui a rendu les comparaisons difficiles.

«C'est un trimestre confus», a résumé Judy Hong, analyste chez Goldman Sachs, dans une note aux investisseurs. Calculs faits, l'analyste estime cependant que Molson a bel et bien battu les attentes.

L'analyste Brian Yarbrough s'est dit agréablement surpris de l'argent fourni par MillersCoors, coentreprise formée par SabMiller et Molson Coors et dont cette dernière détient 42%. La coentreprise a généré des profits de 436 millions US, en hausse de 9,1%, ce qui a amené 186 millions US dans les coffres de Molson Coors.

Les bons prix offerts aux consommateurs, les nouveaux formats de canettes et le contrôle des coûts expliquent les bons résultats de MillersCoors. Les ventes de Coors Light, en particulier, ont connu une bonne croissance.

Outre les États-Unis, les deux autres marchés principaux de Molson Coors sont le Canada et le Royaume-Uni, des territoires qui ont aussi atteint leur maturité et où il faut se battre pour éviter la décroissance.

Au cours du deuxième trimestre, Molson Coors est parvenu à faire croître les ventes de 1,8% au Canada, mais la baisse du dollar canadien a plombé ses profits. Résultat: une baisse des bénéfices de 0,6%.

Les choses se sont plus mal passées au Royaume-Uni, où la météo et la «promotion accrue des compétiteurs» sont tenues responsables d'une baisse des profits de 19,3%.

La division internationale, qui vend autant en Inde et en Chine qu'en Ukraine et en Amérique latine, a aussi accusé des pertes dues à des investissements dans des coentreprises en Inde et en Chine.

À la lumière de ces résultats, on comprend mieux la motivation de Molson Coors d'acquérir Starbev. Le brasseur écoule sa bière dans des pays comme la République tchèque, la Bulgarie, la Hongrie, la Croatie et la Serbie, où la croissance est encore au rendez-vous.

Les premiers résultats sont cependant loin d'être éclatants en Europe centrale. Les profits ont décliné de 37% par rapport aux activités de Starbev. L'analyste Brian Yarbrough s'est toutefois montré convaincu par les explications de l'entreprise, qui a dit avoir dû enregistrer certaines dépenses de marketing dans le deuxième trimestre.

L'analyste doute cependant que la croissance en Europe centrale soit suffisante pour relancer l'entreprise et recommande de conserver l'action plutôt que d'en faire l'achat, une opinion partagée par 78% des analystes répertoriés par Bloomberg.