L'homme d'affaires Claude Pantaloni a fraudé la Banque Scotia pour plus de 10 millions de dollars grâce à un stratagème complexe de transactions bancaires à découvert. Au terme d'une saga judiciaire de 15 ans au délai « complètement hors norme », l'homme de 72 ans a reçu une peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis, à purger chez lui, alors que la poursuite réclamait jusqu'à cinq ans de pénitencier.

« Ce n'est pas une vague probation renforcée ! », a bien précisé le juge Jean-Paul Braun, en prononçant la sentence jeudi. Même s'il évite la prison, le septuagénaire devra rester chez lui en tout temps pour la première année de sa peine, à l'exception d'une marche de 30 minutes par jour. Par la suite, il devra respecter un couvre-feu et effectuer 80 heures de travaux communautaires.

Sa fraude « importante » s'est déroulée entre 2001 et 2002 contre la Banque de Nouvelle-Écosse (BNE), connue sous le nom de Banque Scotia. L'entreprise de Claude Pantaloni, Le Paie Maître P.C., utilisait le système de transfert électronique de fonds de la Scotia pour fournir des services de paie d'employés à des milliers d'entreprises québécoises. Des millions de dollars transitaient ainsi chaque semaine dans ses comptes de la Scotia et de la Banque de Montréal (BMO). Cette dernière n'a subi aucune perte dans cette affaire.

L'accusé a utilisé un stratagème appelé « kiting » ou « cavalerie de chèques » pour cacher des découverts bancaires. En d'autres termes, Claude Pantaloni créait artificiellement des fonds en profitant de la différence entre les heures de tombée et de saisie des retraits et des dépôts de ses deux comptes bancaires.

Il pouvait par exemple débiter 1,4 million du compte d'un client, puis le créditer le jour même ou le jour suivant. Ce ping-pong quasi quotidien de sommes s'est élevé à 643 millions de dollars entre avril et juillet 2012 seulement.

Cependant, la Banque Scotia s'est montrée « grossièrement imprudente » en utilisant, « contrairement à la BMO, un système de détection de kiting défaillant », soutient le juge Braun dans sa décision. La Scotia aurait pu « aisément constater » la fraude en comparant les relevés quotidiens de deux jours consécutifs de l'entreprise. « Le Tribunal se demande comment le système de détection de kiting ou la simple vérification des relevés quotidiens n'a pas amené la BNE à détecter le kiting », ajoute le juge.

Ces « manoeuvres frauduleuses » ont mené l'entreprise de Claude Pantaloni à la faillite. De plus, l'accusé ne s'est pas enrichi avec ce stratagème. L'absence d'antécédents judiciaires et l'âge de l'accusé ont également joué en sa faveur pour l'imposition de cette peine. Le juge Braun a toutefois tenu compte de la « sophistication de la méthode utilisée », de la durée de la fraude et de la perte d'environ 10 millions de la Banque Scotia.