Endetté à hauteur de 15 millions, aux prises avec la grogne d'ex-employés, le studio de jeux vidéo montréalais Hibernum en est à ses derniers tours de piste.

L'entreprise comptant une centaine d'employés, dans laquelle Québec a investi 5 millions en 2014, s'est placée sous la protection de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité le 16 août dernier. Elle doit un total de 15 242 710 $ à 71 créanciers, « une grosse dette » pour une entreprise de cette taille, estime un connaisseur de l'industrie.

« On parle ici d'une année, voire deux de masse salariale, pour des projets de jeux qui coûtent 1 ou 2 millions », indique une autre source.

HUIT CRÉANCIERS GARANTIS

Le plus important créancier d'Hibernum est Investissement Québec, à qui le studio doit 4,1 millions pour des avances de crédit d'impôt, selon ce qu'a pu apprendre La Presse.

Investissement Québec fait partie de la courte liste des huit créanciers garantis qui pourront se partager en priorité les avoirs d'Hibernum. La Banque de Montréal fait également partie du groupe, avec une créance de 2,6 millions.

Hibernum doit par ailleurs 516 476 $ en salaires et en vacances, dont près de la moitié en créance garantie.

Le studio de jeux vidéo a jusqu'à la mi-septembre pour trouver un acquéreur, faute de quoi il pourrait devoir liquider ses actifs. Deux autres studios seraient au coeur des pourparlers. Selon plusieurs sources impliquées dans le dossier, Hibernum aurait réussi à transférer deux de ses projets de jeu, employés et ordinateurs compris, à un autre studio. Le plus grand secret entoure cependant ces projets ainsi que le nom des studios acheteurs.

AVIS, RELEVÉS ET PLAINTES

La « foire à l'emploi » qui s'est déroulée dans les bureaux d'Hibernum à la mi-août, et à laquelle ont été conviés la plupart des autres studios montréalais, aurait permis à quelques dizaines de salariés de trouver un nouvel emploi. « Déjà 50 % des employés sont recasés », estime une source qui tient à garder l'anonymat.

Trois ex-employés d'Hibernum ont toutefois contacté La Presse pour dénoncer le flou entourant la perte de leur emploi, notamment l'impossibilité d'obtenir les avis de cessation d'emploi et les relevés donnant droit à l'assurance-emploi. Une quinzaine d'entre eux ont formellement porté plainte à la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). L'organisme a confirmé avoir des « dossiers actifs » concernant Hibernum. « Les plaintes sont des plaintes pécuniaires (réclamation du préavis de fin d'emploi, salaires non payés, vacances de fin d'emploi) », précise-t-on par courriel.

Le PDG d'Hibernum, Frédérick Faubert, a assuré à La Presse que « tous les relevés d'emploi » ont été produits hier.

« Nous avons investi toutes nos énergies au cours des dernières semaines pour vendre l'entreprise et préserver tous les emplois ou pour vendre certains jeux en y associant nos experts qui les ont développés, a-t-il expliqué par courriel. C'est toujours notre priorité, garantir la transition la plus performante possible pour tous nos employés. »

LES PRINCIPAUX CRÉANCIERS D'HIBERNUM

Investissement Québec : 4,1 millions

Desjardins Capital de risque : 3,3 millions

Banque de Montréal : 2,5 millions

Téléfilm Canada : 2,3 millions

Revenu Québec : 0,5 million

Salaires et vacances : 0,5 million

Unity Technologies ApS : 0,3 million

DDM Dame Studio : 0,2 million

Source : Raymond Chabot