La Réserve fédérale américaine (Fed) devrait une nouvelle fois faire preuve de patience sur les taux d'intérêt mercredi, mais donner des indications sur leur trajectoire à venir alors que la croissance est modeste et que la campagne électorale bat son plein.

«Le Comité de politique monétaire (FOMC) a repris sa réunion à 9h00 comme prévu», a indiqué mercredi une porte-parole de la Réserve fédérale.

Pour cette dernière réunion monétaire importante avant l'élection présidentielle du 8 novembre, la Fed publiera un communiqué à 14h00, accompagné de nouvelles prévisions économiques et la présidente de la banque centrale Janet Yellen donnera une conférence de presse une demi-heure plus tard.

«Le Comité monétaire ne devrait pas relever les taux d'intérêt, mais ses membres devraient enfin indiquer qu'ils entendent vraiment le faire et que cela peut intervenir avant la fin de l'année», a estimé l'économiste indépendant Joel Naroff, reflétant une opinion largement partagée par les analystes.

«La probabilité d'une hausse des taux est très basse», affirme aussi l'économiste en chef pour les États-Unis Jim O'Sullivan de HFE. «Les représentants de la Fed vont probablement tenter de donner des signaux vers une politique moins accommodante, correspondant à un relèvement des taux pour décembre».

Les taux d'intérêt au jour le jour évoluent actuellement entre 0,25% et 0,50%, après avoir été relevés une seule fois, en décembre 2015, depuis la crise financière de 2008.

Un tour de vis monétaire de la Fed n'est pas exclu, mais serait une énorme surprise pour les marchés.

Le gourou des obligations à Wall Street, Bill Gross, est un des rares à estimer qu'il y a une chance sur deux pour que les taux soient relevés.

Les membres du FOMC sont en tout cas apparus divisés ces dernières semaines, promettant «une robuste discussion» sur le besoin imminent ou non de renchérir enfin le coût du crédit.

Si l'inflation est faible (+0,8%, selon l'indice PCE), le marché du travail s'approche du plein emploi et le prix des actifs boursiers et immobiliers gonfle, faisant craindre à certains une bulle financière.

Dans le même temps, la banque centrale veut éviter de freiner la modeste croissance, peu soutenue par la faiblesse de l'économie à l'étranger.

«Les retombées des chocs à l'étranger semblent se transmettre à l'économie américaine de façon plus puissante qu'autrefois», a argumenté récemment une gouverneure influente de la Fed, Lael Brainard, qui prône la patience.

Proche du plein emploi

Sur le front intérieur, tous les regards sont rivés sur le marché du travail afin de jauger si, avec un taux de chômage à 4,9%, on a atteint l'emploi maximum qui augurerait d'une résurgence de l'inflation à travers des hausses de salaires.

Stanley Fischer, le numéro 2 de la Fed, semble le penser, ayant affirmé que l'économie américaine «était proche de ses objectifs».

Janet Yellen a prévenu en août, sans s'engager sur des dates, que «les arguments pour une hausse des taux d'intérêt s'étaient renforcés au cours des derniers mois».

Rehausser les taux se répercuterait sur le coût des crédits à court terme, celui des cartes de crédit et des prêts immobiliers.

Pour la banque centrale, il s'agirait moins de refroidir l'économie - qui a connu une croissance de 1,1% en rythme annualisé au 2e trimestre -que de tenter de normaliser sa politique monétaire. En effet, avec des taux si bas, elle a peu de marge de manoeuvre pour l'avenir, si elle devait soutenir l'activité en cas de récession.

«Quelle bêtise la Fed peut-elle s'autoriser, telle est la question ?», a expliqué à l'AFP Joseph Gagnon, du Peterson Institute for International Economics, résumant le dilemme de la banque centrale.

Selon cet ancien économiste de la Fed, «il vaut mieux faire une bêtise qui coûte un peu trop d'inflation» en patientant encore sur les taux plutôt que d'inhiber une reprise poussive en les relevant et risquer un dangereux ralentissement.

En cette période électorale, l'impartialité de la banque centrale a été mise en doute par le candidat républicain Donald Trump qui a accusé Janet Yellen de jouer le jeu des démocrates en conservant des taux bas pendant les élections.

«On surévalue l'importance politique» de l'action de la Fed, a commenté l'ancien président démocrate Bill Clinton.