Un plus grand nombre de propriétaires qui louent régulièrement des appartements sur Airbnb et d'autres sites web tentent d'obtenir une certification officielle, craignant sans doute les amendes plus salées prévues par la nouvelle loi provinciale. Mais plusieurs ne pourront se conformer aux règles pour sortir de l'illégalité.

Les demandes d'attestation pour des appartements loués entre particuliers ont presque doublé, comparativement à l'année dernière, depuis l'entrée en vigueur le 15 avril des changements à la Loi sur les établissements d'hébergement touristique.

Ces attestations sont nécessaires pour offrir un appartement en location de courte durée sur une « base régulière », comme l'explique le règlement qui accompagne la nouvelle loi.

La Corporation de l'industrie touristique du Québec (CITQ) n'était pas en mesure d'indiquer combien de demandes ont été acceptées. Il y a actuellement 8500 unités certifiées comme résidences de tourisme au Québec.

Lorsqu'elle reçoit une demande d'attestation, la CITQ informe la municipalité concernée, qui a 45 jours pour s'y opposer si le règlement de zonage ne permet pas l'hébergement touristique pour l'adresse visée.

Or, cet usage n'est pas autorisé dans la majorité des endroits où se trouvent les logements offerts sur Airbnb.

POUVOIR AUX ARRONDISSEMENTS

À Montréal, les règlements d'urbanisme sont régis par les arrondissements, qui exigent un permis pour exploiter une résidence de tourisme ou un « hôtel appartement », ce qui n'est pas possible dans les secteurs résidentiels.

Dans l'arrondissement de Ville-Marie, par exemple, qui comprend le centre-ville, ce type d'hébergement est autorisé sur 55 % du territoire, mais un appartement pour touristes ne peut se trouver à moins de 150 m d'un autre logement du même type.

Dans Le Plateau-Mont-Royal, les résidences de tourisme ne sont permises que dans les zones à forte densité commerciale, comme la rue Saint-Denis ou le boulevard Saint-Laurent. L'arrondissement a par ailleurs demandé l'hiver dernier à ses avocats d'« intenter toutes les procédures judiciaires requises » pour faire fermer les résidences pour touristes jugées illégales, à la suite d'une multiplication des plaintes des voisins de ces logements, indisposés par le bruit et le va-et-vient. Cependant, aucune action judiciaire n'a encore donné de résultat, a indiqué hier un porte-parole de l'arrondissement.

Le mois dernier, l'arrondissement de Mercier - Hochelaga-Maisonneuve a proposé de limiter la location d'appartements du type Airbnb à seulement 6 % de son territoire, contre 35 % actuellement. Les résidences de tourisme ne seraient permises que dans les secteurs où le zonage permet un usage mixte commercial et résidentiel, comme les rues Ontario, Sainte-Catherine, Notre-Dame, Hochelaga ou encore Sherbrooke. Cette proposition doit être discutée en assemblée publique avant d'être adoptée.

IMPRÉCISION DANS LA LOI

Les amendes et la vérification plus sévères peuvent inciter les propriétaires à se conformer à la loi, mais plusieurs critiquent son imprécision. Il peut être difficile de déterminer quand un logement est offert « sur une base régulière » ou non.

Le guide d'interprétation proposé sur le site web du ministère du Tourisme indique qu'un logement est offert de façon régulière s'il est annoncé de façon « habituelle, récurrente et constante ».

« C'est malheureux que le gouvernement n'ait pas compris comment ça fonctionne, souligne Guillaume Lavoie. Souvent, des gens vont annoncer leur condo ou leur maison à louer en permanence, mais ils n'accepteront que quelques propositions, trois ou quatre fois par année, pour des dates qui leur conviennent, alors qu'ils peuvent eux-mêmes partir en voyage. Mais ces propriétaires seront-ils mis à l'amende si leur annonce est toujours affichée ? »

« L'exploitant s'expose en effet à recevoir un avis d'infraction, a indiqué par courriel un porte-parole de Tourisme Québec, Guy Simard. L'assujettissement à la loi se fait sur la base de l'offre et non sur le nombre de jours de location qui en résulte. Dès qu'une unité d'hébergement est offerte en location sur une base régulière et est rendue publique, et ce, peu importe le nombre de locations effectuées au courant de l'année, l'exploitant doit se conformer à la loi. »

Environ la moitié des logements offerts sur le site Airbnb dans les quartiers centraux de Montréal ne semblent pas être les lieux de vie de leurs propriétaires, mais des appartements strictement réservés à la location, selon une évaluation rapide.

Le ministère du Tourisme n'a actuellement que deux inspecteurs pour débusquer les logements illégaux pour touristes, mais 16 autres arriveront en renfort sous peu.

Amendes prévues pour un particulier offrant de l'hébergement illégal

Avant le 15 avril 2015 : 

750 à 2250 $/jour

Maintenant : 

2500 $ à 25 000 $/jour

Hébergement offert de façon régulière : 

Chambre offerte dans une résidence toutes les fins de semaine ;

Résidence secondaire offerte en location pendant l'été, la période des Fêtes, la semaine de relâche ;

Chalet à louer pendant deux mois ;

Condo offert avec un calendrier ouvert.

Hébergement offert de façon non régulière : 

Appartement offert chaque année pendant un festival ;

Condo disponible pendant que le propriétaire s'absente pour ses vacances ;

Chalet à louer pendant la semaine de relâche.

Source : Guide d'interprétation de la Loi sur les établissements d'hébergement touristiques