Des chiffres de l'emploi « inquiétants » et une grande « incertitude »: la présidente de la Fed Janet Yellen a renoncé lundi à s'engager sur une hausse des taux, à une semaine d'une réunion de la banque centrale américaine.

Lors de sa dernière intervention publique fin mai, la dirigeante avait certes promis un nouveau relèvement des taux fédéraux « dans les prochains mois » après celle décidée en décembre qui avait mis fin à sept ans de politique de taux zéro.

Mais le marché du travail aux États-Unis vient tout juste de montrer des signes de faiblesses inattendus avec des créations d'emplois en mai qui sont tombées à leur plus bas niveau depuis 2010, prenant totalement de court les analystes.

« Ce récent rapport sur l'emploi a été, globalement, inquiétant », a reconnu Mme Yellen lors d'un discours à Philadelphie.

« De récents signes de ralentissement des créations d'emplois requièrent une surveillance étroite », a-t-elle ajouté, ajoutant que les chiffres publiés vendredi dernier soulevaient de « nouvelles interrogations ».

Le plein emploi fait partie des objectifs assignés à la banque centrale américaine qui attend d'avoir des garanties suffisantes sur l'amélioration du marché du travail pour normaliser davantage sa politique monétaire.

La dirigeante a toutefois tenu à relativiser la portée des chiffres sur l'emploi, en assurant qu'il ne fallait pas accorder « trop d'importance » à des données mensuelles, souvent sujettes à d'importantes révisions, et que l'état du marché du travail américain restait « globalement positif ».

« J'ai de bonnes raisons de penser que les forces positives tendant à une croissance de l'emploi et à une inflation plus haute continueront de dépasser les forces négatives », a tenté de rassurer Mme Yellen.

Les risques du « Brexit »

La dirigeante a toutefois reconnu que cette contre-performance sur l'emploi trahissait la « considérable incertitude » qui continue d'entourer l'économie américaine et mondiale.

Mme Yellen a notamment assuré qu'une possible sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, qui est soumise à référendum le 23 juin, pourrait alarmer les investisseurs et avoir « d'importantes répercussions » économiques.

La Fed et plusieurs autres institutions internationales comme le FMI ont mis en garde contre les risques d'un « Brexit » à l'heure où l'issue du scrutin est de plus incertaine.

Évoquant également le ralentissement chinois, la faible productivité américaine ou le niveau encore insatisfaisant de l'inflation, Mme Yellen a assuré que ce cocktail d'incertitudes pesait sur les orientations monétaires de la Fed.

Elle a certes répété qu'une nouvelle hausse des taux graduelle resterait sans « doute appropriée » au vu de l'amélioration de la conjoncture américaine. Mais elle s'est, cette fois, gardée de donner la moindre précision de calendrier alors que la Fed tient les 14 et 15 juin une réunion sur les taux.

« Elle n'a donné aucun élément sur le "timing" (...). En clair, elle a gardé différentes options possibles », a commenté Jim O'Sullivan, du cabinet High Frequency Economics.

Depuis la publication du rapport sur l'emploi de mai, la plupart des analystes s'attendent toutefois à ce que la Fed maintienne ses taux directeurs à leur niveau actuel, dans une fourchette de 0,25 à 0,50 %.

Mme Yellen n'en a pas dit plus lundi, mais a reconnu que la tâche du comité qui décide des orientations de politique monétaire américaine (FOMC) ne serait pas aisée face aux nombreuses incertitudes.

« Mes collègues et moi-même devrons nous confronter à ça et à d'autres questions dans les temps qui viennent », a-t-elle dit.

La présidente de la Fed a également dû esquiver une question du public sur la campagne des primaires américaines et plus précisément sur le risque d'un crash économique si le candidat républicain Donald Trump arrivait à la Maison-Blanche.

« Désolé, je n'ai rien à vous dire là-dessus », a lancé cette démocrate que M. Trump a promis de remplacer s'il était élu.

« Nous sommes juste concentrés sur notre mission et nous verrons ce qui arrivera », a-t-elle ajouté.