BCE a annoncé lundi avoir conclu une entente amicale de 3,9 milliards $ pour racheter Manitoba Telecom Services (MTS), une des rares entreprises régionales de télécommunications indépendantes à livrer concurrence aux trois géants canadiens de ce secteur.

L'accord prévoit ainsi que le plus grand fournisseur de services de téléphonie, internet et sans fil du Manitoba sera incorporé aux activités du conglomérat montréalais, qui comprennent le réseau de télévision CTV, les chaînes de radio Astral et Bell Canada.

«En vertu de cette transaction, les réalisations de MTS seront bien plus importantes qu'elles n'auraient pu l'être en tant que société indépendante», a fait valoir le président et chef de la direction de Manitoba Telecom, Jay Forbes, lors d'une conférence téléphonique avec des analystes.

«L'engagement de BCE d'investir 1 milliard $ en cinq ans dans l'infrastructure des télécommunications du Manitoba va aussi grandement contribuer à la prospérité de notre province et à la qualité de l'expérience de nos clients.»

En outre, BCE a accepté de vendre environ le tiers des abonnés mensuels aux services sans fil de Manitoba Telecom et le tiers des magasins de MTS au Manitoba à la vancouvéroise Telus (TSX:T).

«Clairement, la position de Telus dans l'industrie sans fil s'améliore significativement avec cette transaction, tout comme celle de Bell», a souligné le président et chef de la direction de BCE, George Cope.

«Alors nous nous attendrions, je crois, à ce que le marché continue d'être aussi concurrentiel qu'il l'a été - sinon plus - avec tout ceci.»

L'entente devra obtenir le feu vert du Bureau de la concurrence, du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) et du ministère fédéral de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique - anciennement appelé Industrie Canada.

Dans un courriel, un porte-parole du ministre de l'Innovation, Navdeep Bains, a indiqué que la priorité du ministère serait de s'assurer du maintien de la concurrence pour les Manitobains et de voir à ce que l'investissement dans le service rural se poursuive.

«Même si le gouvernement ne commente pas les plans d'affaires individuels des sociétés, de telles transactions devraient être assujetties à toutes les approbations réglementaires pertinentes», est-il écrit dans le courriel. «Nous allons nous assurer avec précaution que cela réponde à toutes les inquiétudes des Manitobains.»

Selon l'analyste Aravinda Galappatthige, de Canaccord Genuity, l'entente pourrait entraîner une nouvelle vague de consolidation dans l'industrie sans fil.

«Si l'entente BCE-MTS est approuvée, nous croyons qu'elle créera un précédent significatif, puisque le marché du sans-fil au Manitoba passera de quatre à trois joueurs», a indiqué M. Galappatthige dans une note à ses clients.

Bell traîne derrière la torontoise Rogers (TSX:RCI.B) et Telus en ce qui a trait au nombre d'abonnés sans fil, mais BCE est de loin le plus grand des trois géants au chapitre de la valeur boursière. Celle-ci est actuellement d'environ 51 milliards $, comparativement à 23,6 milliards $ pour Telus et 19,7 milliards $ pour Rogers.

Rogers comptait cependant 9,9 millions d'abonnés à ses divers services sans fil en date du 31 décembre, comparativement à 8,45 millions pour Telus et 8,24 millions pour Bell. Le service de téléphonie mobile de MTS compte 483 000 abonnés.

L'accord prévoit que Manitoba Telecom (TSX:MBT) devra rompre ses liens commerciaux avec Rogers Communications, qui lui donnait un accès de gros à son marché national.

Ni M. Forbes ni M. Cope n'ont donné de détail sur les coûts qui pourraient être liés au démantèlement du lien avec Rogers ou au prix que Telus devrait payer pour acquérir sa part des abonnés sans fil de MTS.

Avec la transaction, environ 2700 employés de MTS passeraient aux activités de téléphonie de Bell. Les activités de Bell dans l'ouest du pays doubleraient essentiellement leur main-d'oeuvre à 6900 employés, qui travailleraient sous la bannière Bell MTS, dont le siège social serait à Winnipeg.

Même si elles entretenaient une relation plutôt amicale, BCE et Manitoba Telecom se sont occasionnellement affrontées et une certaine concurrence était toujours présente.

BCE a déjà été un grand acheteur d'actions de Manitoba Telecom et plusieurs rumeurs la voyaient alors prendre le plein contrôle de l'entreprise.

Mais Manitoba Telecom a choisi une route complètement différente pour conserver son indépendance et a plutôt choisi de racheter Allstream, une société torontoise qui livrait une concurrence directe à BCE sur le marché national pour les clients d'affaires. MTS a complété en janvier la vente de Allstram à Zayo Group, de Boulder, au Colorado, pour 465 millions $ en espèces - ce qui a retiré un important obstacle pour BCE.

BCE offre 40 $ pour chaque action de MTS, dont environ 45 pour cent en espèces et 55 pour cent en actions. L'entente verrait aussi BCE prendre la responsabilité d'une dette d'environ 800 millions $.

BCE aura l'occasion d'égaler toute offre supérieure qui pourrait être présentée à MTS. Chaque partie a accepté de payer une indemnité de rupture de 120 millions $, selon les circonstances, dans l'éventualité où l'entente ne serait pas complétée.