Yahoo! (YHOO) a modifié mercredi son plan de scission en deux sociétés indépendantes, dont une regroupant ses activités internet historiques, et a confirmé sa patronne fragilisée Marissa Mayer, sans pour autant lever les incertitudes sur son avenir.

Le pionnier du web a renoncé à se séparer comme il le prévoyait depuis plusieurs mois de sa participation de 15% dans le géant du commerce en ligne Alibaba, évaluée à une trentaine de milliards de dollars, afin d'éviter à ses actionnaires de payer d'éventuels impôts. Il promettait depuis janvier de leur distribuer cet argent sous la forme d'un dividende exceptionnel.

À la place, les autres «actifs et passifs de Yahoo (...) seraient transférés dans une nouvelle entité», donnant naissance à «deux sociétés cotées distinctes», a annoncé le groupe après plusieurs jours de spéculations.

À terme, cette décision rend possible une vente du portail internet, créé en 1994 et qui a vu son concurrent Google le dépasser irrémédiablement, et de ses autres activités en ligne.

Maynard Webb, le président du conseil d'administration, a affirmé mercredi qu'«aucune décision du conseil de vendre l'entreprise ou une quelconque activité n'était prise».

«Le conseil a l'obligation de discuter avec n'importe quelle personne légitime se présentant avec une bonne offre», a-t-il néanmoins ajouté.

Nul doute que les prétendants vont se bousculer. Même en perte de vitesse, le moteur de recherche demeure l'un des services les plus visités du web, après Google et Facebook. Et, entre son service de courriels et son site d'actualités Yahoo News, la marque Yahoo! a drainé pas moins de 210 millions de visiteurs en octobre aux États-Unis, selon les données de ComScore.

Marissa Mayer confirmée 

«Il y a des actifs qui iraient bien avec AOL», a déjà estimé mardi Lowell McAdam, le PDG de Verizon, qui cherche actuellement à développer ses activités en ligne, en particulier dans la vidéo et la publicité. Cette stratégie l'avait déjà conduit plus tôt cette année à payer 4,4 milliards de dollars pour racheter un autre pionnier d'internet, AOL.

Les activités historiques du groupe pourraient aussi intéresser les magnats des médias Barry Diller (IAC/Interactive) et Rupert Murdoch (NewsCorp) ou encore le fonds TPG, selon la presse américaine.

Yahoo! n'a pas donné les détails sur sa future stratégie, donnant rendez-vous début 2016. La patronne Marissa Mayer semble avoir sauvé sa tête pour l'instant, en dépit du fait que la scission des activités internet scelle un désaveu de sa vision et apparaît comme une victoire pour le fonds activiste et actionnaire Starboard Value, favorable à leur vente.

Le conseil garde confiance en Mme Mayer et va l'aider à redonner son lustre à Yahoo!, a assuré Maynard Webb.

«Je ne sais pas si Marissa Mayer est la personne idoine pour sortir l'entreprise de sa mauvaise passe», confie l'analyste Roger Kay chez Endpoint Technologies.

Tout aussi sceptique, Bob O'Donnell chez Technalysis se demande «quel tour de magie va effectuer Marissa Mayer cette fois-ci». «Ce n'est pas la première fois qu'ils (Yahoo!) essaient de raviver le coeur du métier», argue-t-il.

À Wall Street, le titre perdait plus de 3% vers 14 h.

Malgré son manque d'expérience comme chef d'entreprise, Marissa Mayer avait été débauchée il y a trois ans chez Google. Les investisseurs avaient vu dans cette jeune ingénieure créative et à l'image glamour, le sauveur capable de redonner à Yahoo! sa position perdue de fleuron d'internet.

Elle a modernisé plusieurs produits historiques comme la messagerie Yahoo! Mail. Elle a payé plus d'un milliard de dollars en 2013 pour Tumblr et l'espoir de rajeunir l'image du groupe. Et elle a multiplié les acquisitions de start-ups pour renforcer des activités jugées porteuses comme le mobile ou la vidéo en ligne. Jusqu'ici, cela n'a toutefois pas ramené la croissance.

Les défenseurs de la scission du coeur de métier de Yahoo! font valoir que cela permettrait d'en faire apparaître la valeur, qui n'est aujourd'hui pas du tout prise en compte dans la valorisation boursière du groupe. Celle-ci reflète uniquement la valeur de ses participations asiatiques dans Alibaba ou le portail Yahoo Japan.

Elle permettrait aussi de faire des économies: Yahoo! pourrait par exemple supprimer jusqu'à 11.000 emplois, selon les calculs des analystes.