Le groupe finlandais Nokia s'est rapproché mercredi de l'acquisition avec le franco-américain Alcatel-Lucent, les actionnaires donnant leur accord à cette transaction qui doit créer un géant mondial des équipements en télécoms.

L'assemblée générale extraordinaire à Helsinki a entériné l'opération sans vote. Ceux qui s'étaient exprimés par avance avaient dit oui à 99,5 %.

Ne reste donc plus qu'à obtenir assez d'actions Alcatel-Lucent, et la fusion sera effective d'ici à fin mars.

« Maintenant il ne s'agit plus que d'assurer la réussite de l'offre » ouverte à la Bourse de Paris jusqu'au 23 décembre, a déclaré à l'AFP le directeur général de Nokia, Rajeev Suri.

« J'ai vraiment confiance puisque nous avons vu que nous avons un large soutien des actionnaires, celui des clients, des régulateurs », a-t-il souligné.

Quant aux actionnaires d'Alcatel-Lucent, ils peuvent selon lui espérer profiter à l'avenir de la politique généreuse de redistribution des bénéfices en vigueur chez Nokia.

La réunion a surtout offert à la direction de Nokia l'occasion de mettre en avant une ambition renouvelée. Les deux groupes doivent redorer un blason terni par des années de difficultés financières.

« Non seulement nos portefeuilles sont fortement complémentaires, mais nos cultures respectives ont beaucoup de similitudes », a déclaré M. Suri à ses actionnaires.

Son groupe, après avoir perdu en 2012 sa place de numéro un mondial des téléphones portables, a vendu deux ans plus tard cette activité qui avait fait sa renommée. Le bon prix qu'il en a tiré (7,7 milliards $ CAN) a assaini ses finances, et il concentre aujourd'hui ses forces sur un secteur où il est un compétiteur redouté : la fourniture de logiciels et de services dans les télécommunications.

Le groupe fusionné vise près de 25 milliards d'euros (35 milliards $ CAN) de chiffre d'affaires.

Alcatel-Lucent, issue d'une fusion dont les résultats ont déçu, avec une seule année de bénéfices depuis 2006, apporte un portefeuille d'activités et clients complémentaire, notamment en Amérique du Nord.

Force de frappe

Dès qu'elle a été annoncée, en avril, la fusion a été saluée par les analystes financiers. Pour eux, Nokia et Alcatel-Lucent gagneront en force de frappe face aux deux autres poids lourds de cette industrie, le suédois Ericsson et le chinois Huawei.

« À notre avis elle a un sens. Bien sûr chaque transaction présente ses difficultés propres et elle ne sera pas simple, mais il est clair qu'elle apportera l'avantage de la taille », explique Kristian Tammela, analyste de la branche banque privée de Nordea.

Les voix critiques sont venues des syndicats, qui craignent des suppressions d'emploi. Celui des ingénieurs en Finlande a dit redouter les effets du coût nettement supérieur d'un licenciement en France.

M. Suri a assuré qu'il était là pour faire croître le groupe, même s'il ne peut « pas garantir qu'il y aura pas de restructuration ». « J'aime tirer les entreprises vers le haut (...). C'est ce que nous avons tâché de faire avec Nokia Siemens Networks par le passé, qui était au bord du gouffre il y a quelques années », soulignait-il.

Certains actionnaires doutent que tout aille aussi bien que promis. « Ça peut être terriblement difficile, deux grosses entreprises avec une culture différente dans chacune. Comment vont-ils se débrouiller pour les fondre? Ce n'est pas simple du tout », affirmait Reijo Hakonen, retraité finlandais qui avait parcouru 800 km pour être présent dans la capitale.

« Nous garderons la Finlande dans notre ADN », a assuré M. Suri.

Cette acquisition ne sera qu'une des multiples métamorphoses de l'histoire de Nokia, entreprise papetière à l'origine, qui a fabriqué des pneus, des câbles et des téléviseurs, avant de tout miser sur les télécoms à partir des années 1990.