Le grand patron de Valeant Pharmaceuticals (T.VRX) demande aux autorités réglementaires des États-Unis d'ouvrir une enquête sur la firme Citron Research, qui a soulevé des questions, la semaine dernière, sur les pratiques d'affaires de la société pharmaceutique de Laval et a fait plonger le cours de son action.

Lors d'une conférence téléphonique avec des analystes lundi matin, Michael Pearson a fait valoir que la principale raison derrière les problèmes de Valeant résidait dans de fausses allégations mises de l'avant par des gens qui voulaient manipuler le marché dans leur propre intérêt.

M. Pearson a demandé à la Securities and Exchange Commission d'enquêter sur Citron Research et sur son directeur, Andrew Left. La firme américaine a comparé Valeant à l'ex-géant de l'énergie Enron, qui a fait scandale au début des années 2000 pour une histoire de vaste fraude opérée par certains de ses plus hauts dirigeants.

«Ses motivations sont les mêmes que celles d'une personne qui entre en courant dans une salle bondée de monde pour crier "Au feu!". Il veut que les personnes se mettent à courir», a illustré M. Pearson.

«Il a intentionnellement conçu le rapport pour faire peur à nos actionnaires pour faire reculer le prix de notre titre pour qu'il puisse faire de l'argent avec ses ventes à découvert», a-t-il ajouté.

M. Left a pour sa part fait valoir que c'était plutôt M. Pearson qui devait des explications aux gens.

«Avant de m'accuser de manipulation du marché, M. Pearson devrait se demander pourquoi l'existence de Philidor n'avait pas été dévoilée aux actionnaires de Valeant», a avancé M. Left dans un courriel.

La SEC a refusé de commenter la situation.

La firme de recherche Citron se spécialise dans la vente à découvert et publie des rapports en ligne au sujet de différentes entreprises. Les vendeurs à découvert font de l'argent quand l'action d'une entreprise recule. Sur son site Internet, Citron affirme qu'elle ne garantit pas qu'elle fournit toute l'information disponible et que ses dirigeants détiennent «presque toujours» des actions dans les sociétés présentées sur son site.

Dans son rapport sur Valeant, Citron a accusé la semaine dernière la pharmaceutique d'avoir mis sur pied un réseau factice de pharmacies dans le but de tromper les vérificateurs - une allégation que M. Pearson a qualifiée de «complètement fausse».

L'action de Valeant a plongé depuis la publication du rapport, ce qui a fait reculer sa valeur boursière de plusieurs milliards de dollars. Le titre a encore perdu lundi 7,35 $, soit 4,8 pour cent, pour clôturer à 145,34 $ à la Bourse de Toronto.

M. Pearson a assuré que Valeant respectait les lois ainsi que les règles de comptabilité et de transparence, ajoutant qu'il n'hésiterait pas à prendre les décisions qui s'imposent s'il découvrait des irrégularités.

Le conseil de Valeant effectuera sa propre enquête sur les allégations au sujet des liens d'affaires que la société entretient avec Philidor, une société pharmaceutique spécialisée établie à Hatboro, en Pennsylvanie. L'enquête du comité déterminera si Valeant doit maintenir sa relation avec Philidor ou se tourner vers plusieurs autres sociétés pharmaceutiques spécialisées, a expliqué Valeant.

Philidor a diffusé un communiqué pour préciser qu'elle estimait sa relation avec Valeant et qu'elle fournirait toute l'information requise dans le cadre de l'enquête.

L'administrateur Robert Ingram, qui siège au sein du conseil de Valeant depuis cinq ans, a affirmé que les administrateurs avaient une pleine confiance envers M. Pearson, les pratiques comptables de la société et le recours aux sociétés pharmaceutiques spécialisées.

«Cela étant dit, il y a d'autres allégations qui ont été évoquées publiquement en lien avec Philidor et nous croyons, en tant que conseil, qu'il est important de vérifier ces questions et toute autre question qui pourrait être soulevée», a affirmé M. Ingram.

Parmi ces autres questions se trouvent des allégations rapportées dans un article du Wall Street Journal, selon lesquelles certains employés de Valeant installés chez Philidor utiliseraient des comptes de courriel avec des noms fictifs, incluant l'alter ego de Spiderman, Peter Parker.

Philidor a expliqué dans un courriel que ces employés ont créé des comptes de courriel distincts pour garder leurs communications internes chez Philidor séparées de celles de Valeant, essentiellement pour réduire le risque de partager accidentellement des informations confidentielles d'une entreprise ou de l'autre.

«Pour réduire davantage ce risque, des noms clairement dissociables ont été utilisés pour les comptes de courriel, a indiqué Philidor. Cependant, leurs identités véritables sont bien connues des autres employés de Philidor puisqu'ils étaient présents au seul emplacement que détenait Philidor à l'époque et Philidor était encore une entreprise en démarrage avec un petit nombre d'employés.»

Au cours de la conférence téléphonique de Valeant, la chef de la conformité de la pharmaceutique, Seana Carson, a indiqué que le recours aux noms fictifs était une des questions qui serait examinée de plus près par l'enquête du comité du conseil.

Au cours de la conférence de plus d'une heure, plusieurs hauts dirigeants de Valeant et membres du conseil ont détaillé la relation de la société avec les entreprises pharmaceutiques spécialisées comme Philidor et R&O.

M. Pearson a assuré que le modèle d'affaires de Valeant en regard des pharmacies spécialisées était «sain» et qu'il permettait aux patients d'avoir accès aux médicaments à un prix raisonnable. Les critiques de ce système font valoir qu'il encourage le recours aux traitements plus dispendieux qui ne sont souvent pas couverts par les assureurs.

Selon Valeant, le recours à ces pharmacies est chose courante dans le secteur de la dermatologie, et plusieurs entreprises l'utilisent, notamment Allergan, Galderma et Novartis.

Valeant fait affaire avec Philidor depuis les premiers mois de 2013. Il y a environ un an, elle a allongé environ 100 millions $ US et a accepté de verser un autre 133 millions $ US en paiements d'étape pour décourager Philidor de rechercher d'autres partenaires pour ses traitements et s'assurer que la plus grande partie de ses volumes était attribuable aux produits de Valeant.

Philidor représentait environ sept pour cent des revenus totaux de Valeant au troisième trimestre.

Par ailleurs, Valeant a annoncé lundi qu'elle mettait sur la glace son projet de vendre ou d'essaimer sa division de la neurologie, ce qu'elle avait annoncé il n'y a qu'une semaine.