Présumant que l'économie canadienne était en récession technique au premier semestre, la Banque du Canada choisit d'abaisser son taux directeur une deuxième fois cette année. Il passe de 0,75% à 0,50%.

«L'économie canadienne subit un ajustement notable et complexe. Un nouvel assouplissement de la politique monétaire est nécessaire à l'heure actuelle afin d'aider l'économie à retourner à son plein potentiel et l'inflation à la cible de façon durable», lit-on dans le communiqué faisant part de sa décision à laquelle s'attendaient bien des prévisionnistes.

Reste à voir maintenant si les institutions financières vont emboîter le pas et abaisser à leur tour le taux préférentiel auquel elles prêtent à leurs meilleurs clients.

En janvier, lors de la première baisse du taux directeur en plus de quatre ans, elles avaient hésité plusieurs jours avant de jouer partiellement leur rôle de courroie de transmission de la politique monétaire. Leur taux préférentiel se situe à 2,85%.

La Banque admet avoir sous-estimé la durée du choc pétrolier qui a entraîné un repli plus prononcé que prévu des investissements des entreprises dans le secteur énergétique. La chute est désormais estimée à 40% au lieu de 30%, les entreprises ne pouvant compter sur une remontée aussi forte qu'anticipée des cours du brut.

Ni dans son communiqué ni dans son Rapport sur la politique monétaire (RPM), la Banque n'utilise le mot récession, qui semble faire aussi peur aux marchés financiers qu'un film de vampires aux tout petits. 

Toutefois, après une croissance annualisée négative de 0,6% au premier trimestre, elle estime que celle du deuxième se sera soldée par un nouveau recul de 0,5%. Statistique Canada fera connaître les données à la fin août seulement.

Il est convenu de parler de récession technique quand on observe  deux reculs trimestriels consécutifs du Produit intérieur brut réel, c'est-à-dire de la taille de l'économie mesurée sans tenir compte de l'inflation. 

En revanche, les segments de l'économie qui ne sont pas liés aux ressources, qui représentent plus de 80% de l'activité, ont poursuivi leur expansion au premier semestre.

En font foi, les chiffres positifs de l'emploi et des mises en chantier dans les provinces non pétrolières. Voilà pourquoi il serait faux de parler de récession profonde comme en 2008 et 2009 pour décrire la situation actuelle. Il s'agit plutôt d'un passage à vide.

Selon la théorie classique, toute récession est suivie d'une phase de reprise, ce que confirme le RPM : «Plusieurs facteurs laissent entrevoir une reprise de la croissance au troisième trimestre, suivie d'un renforcement», y lit-on.

Au troisième trimestre la croissance annualisée devrait se situer à 1,5%, ce qui reste néanmoins bien en deçà des 2,8% escomptés dans le RPM de la mi-avril. À l'automne, la croissance devrait s'accélérer à 2,8%. 

Au final, l'expansion de 2015 est désormais projetée à 1,1% seulement, contre 1,9% dans la projection du RPM d'avril.

Pour 2016, le rythme d'expansion est ramené de 2,5% à 2,3% tandis que celui de 2017 est désormais estimé à 2,6%, contre 2,0% en avril.

Le résultat net de toutes ces révisions, c'est que l'économie canadienne ne fonctionnera à pleine capacité qu'au premier semestre de 2017. En avril, la Banque estimait que ce serait chose faite, fin 2016.

En conséquence, ce n'est qu'en 2017 que le taux d'inflation devrait se stabiliser à la cible de 2%, bien qu'il évoluera près de la cible dès l'hiver, quand l'effet de la baisse des prix de l'essence sera évacué du taux annuel de l'indice des prix à la consommation.

En janvier, la baisse du taux directeur avait fait chuter le dollar canadien face au billet vert. La Banque ne veut pas faire de prévision sur le taux de change. Son scénario, qui inclut l'allégement monétaire d'aujourd'hui est basé sur un taux de change de 80 cents américains.

La prochaine date de fixation du taux directeur sera le 9 septembre.