Le câblo-opérateur américain Charter Communications a annoncé mardi le rachat de son rival américain Time Warner Cable (TWC), le soufflant ainsi au français Altice qui vient de prendre pied aux États-Unis en pleine consolidation du secteur.

Après des tentatives infructueuses en 2013, le numéro quatre américain du câble a décidé de couper court aux spéculations en mettant mardi sur la table 55,3 milliards de dollars pour fusionner avec TWC et créer un titan du câble aux États-Unis. La transaction s'élève au total à 78,7 milliards de dollars dette comprise.

Le milliardaire français Patrick Drahi, qui est à la tête d'un empire des médias et des télécommunications en France comprenant l'opérateur Numéricable-SFR ou encore les journaux L'Express et Libération, ne fera pas de contre-offre, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. Sollicité, Altice s'est refusé à tout commentaire.

La bataille tant espérée entre l'homme d'affaires français et son mentor, le milliardaire américain John Malone (Liberty Media, Charter) n'aura finalement pas lieu.

Patrick Drahi, qui avait rencontré la semaine dernière le PDG de TWC Robert Marcus à New York pour discuter d'un éventuel rapprochement entre les deux groupes, selon des sources proches du dossier, n'a finalement pas fait d'offre. Pourtant, des banques s'étaient bousculées pour lui apporter les financements nécessaires, selon des sources bancaires et proches du dossier.

La menace Netflix 

Le milliardaire français, qui a pris le contrôle la semaine dernière de Suddenlink, le septième opérateur américain, devrait se renforcer aux États-Unis via de nouvelles acquisitions dans les prochains mois. Comme en Europe, il examine d'autres pistes car il veut rester au centre des grandes manoeuvres dans le secteur, selon ces sources.

En mettant la main sur TWC, Charter, qui va aussi racheter dans la foulée le sixième câblo-opérateur américain Bright House, donne naissance à un groupe disposant de près de 24 millions d'abonnés, contre 27 millions au numéro un du secteur Comcast.

«Nous serons capables d'accélérer le déploiement du très haut débit» et de proposer les technologies les plus avancées en matière de vidéo, le tout à «des prix compétitifs», a souligné Tom Rutledge, PDG de Charter, qui dirigera la nouvelle entité.

C'est une étape importante dans la consolidation d'un secteur très éclaté avec une foultitude d'acteurs locaux mais qui est chamboulé par les nouvelles habitudes des consommateurs américains et la montée en puissance des fournisseurs de contenus comme Netflix, Amazon ou Hulu, qui proposent de la vidéo en ligne (streaming). Ces changements obligent les distributeurs à proposer des catalogues fournis et attractifs pour ne pas perdre pied.

Seul hic: cette adaptation passe par une hausse des coûts, selon les analystes, d'autant que les câblo-opérateurs sont pressés par les chaînes sportives qui essaient de répercuter sur eux l'envolée des droits sportifs. Aussi, espèrent-ils  en grossissant augmenter leur poids dans les négociations commerciales avec les fournisseurs de contenus, selon les analystes.

La recomposition du secteur est scrutée de près par les autorités de la concurrence car les câblo-opérateurs sont avec les opérateurs télécoms l'un des principaux moyens d'accès à internet aux États-Unis.

Il y a un mois, les réticences des régulateurs américains ont eu raison des projets de fusion entre Comcast et TWC.

Mais les analystes sont moins pessimistes pour ce qui est du rapprochement Charter-Time Warner Cable.

«Nous ne nous attendons pas à des obstacles aussi colossaux que ceux auxquels était confronté Comcast», estime Kannan Venkateshwar chez la banque Barclays, faisant remarquer que la zone couverte par Charter-TWC est moins large que celle de Comcast-TWC, qui, à eux deux, allaient contrôler 30% de la télévision payante aux États-Unis.

«Toutefois au vu du tollé politique qu'avait soulevé l'opération Comcast, nous pensons que celle-ci (Charter-TWC) va recevoir un examen aussi approfondi même si elle est de taille moindre», fait-il valoir.

«La Commission va regarder quels en seraient les bénéfices pour les consommateurs américains si cette opération était approuvée», a dit Tom Wheeler, le président de la FCC, le régulateur des télécoms, dans un communiqué. En cas de véto, Charter versera 2 milliards de dollars à Time Warner Cable.