C'est un revers qui fait encore plus mal à TVA Sports qu'une défaite du Canadien de Montréal en séries éliminatoires. Un revers qui, du propre aveu de Québecor, remet en question la survie de TVA Sports.

La chaîne sportive du Groupe TVA a perdu hier son litige en arbitrage contre Bell devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Les deux entreprises ne s'entendaient pas sur le taux de redevances que doit verser Bell pour distribuer TVA Sports 1 et TVA Sports 2 à ses abonnés. Le CRTC a tranché en faveur de l'offre de Bell, que l'organisme a jugé «plus raisonnable» que celle de Québecor.

Pour convaincre le Conseil de la justesse de son offre, Québecor a notamment évoqué le scénario de la fermeture de TVA Sports. «L'acceptation de la grille tarifaire de Bell Télé met à risque la pérennité et la viabilité de TVA Sports. [...] Sans pouvoir compter sur les revenus adéquats pour assurer sa survie à long terme, TVA Sports pourrait disparaître», écrit Québecor dans des documents remis au CRTC. TVA Sports détient les droits sur les matchs nationaux de la Ligue nationale de hockey (LNH) jusqu'en 2025-2026.

En raison des règles du CRTC sur l'arbitrage des litiges entre diffuseurs et distributeurs, les détails des offres de Québecor et Bell sont confidentiels. Dans sa décision, le CRTC précise toutefois que Québecor cherchait un tarif mensuel similaire à celui de RDS. Selon nos informations, RDS reçoit en moyenne 4$ par mois par abonné des distributeurs au Québec, tandis que TVA Sports a vu son tarif augmenter de 75 cents, à environ 3$ cette année, en raison de son nouveau statut de diffuseur officiel de la LNH.

Le CRTC a jugé que Québecor ne pouvait demander un tarif mensuel similaire à celui de RDS puisque «la valeur accordée à RDS par les consommateurs est considérablement plus élevée que celle accordée à TVA Sports, compte tenu des cotes d'écoute respectives des deux services». L'organisme réglementaire n'exclut toutefois pas la possibilité que TVA Sports puisse un jour «justifier l'ampleur de l'augmentation de tarif qu'il propose».

TVA Sports difficile à rentabiliser

Dans sa décision, le Conseil souligne que, de l'aveu même de Québecor, TVA Sports est une chaîne de télé difficile à rentabiliser. «Québecor souligne que même avec ses tarifs actuels, soit ceux proposés dans son offre, TVA Sports n'est toujours pas en mesure de rentabiliser ses investissements», écrit le CRTC.

En 2012-2013 (dernière année où les données financières des chaînes sont rendues publiques), TVA Sports a perdu environ 19 millions de dollars, alors que RDS (propriété de Bell Média) a réalisé des profits d'environ 49 millions. Les finances des deux chaînes sportives subiront des changements importants cette année en raison de l'arrivée de TVA Sports comme diffuseur officiel de la LNH. Selon nos informations, TVA Sports devrait continuer de perdre plusieurs millions de dollars par année, tandis que RDS verra ses profits diminuer de près de 50%, soit d'environ 50 millions à 25 millions par année.

TVA Sports et Bell ont négocié de façon très serrée avant l'arbitrage devant le CRTC. Selon les documents déposés par Bell, TVA Sports a demandé à Bell de retirer le signal multiplateforme de TVA Sports à la fin de septembre, tout juste avant le début de la saison dans la LNH, dont la plupart des matchs sont diffusés à TVA Sports. Bell a alors demandé l'arbitrage au CRTC, ce qui avait notamment comme avantage d'empêcher un blackout. Conformément aux règles du CRTC, chaque partie a soumis son offre. Le CRTC, qui devait choisir l'une des deux offres, a tranché en faveur de celle de Bell, qui proposait essentiellement de payer des redevances similaires à ce que Vidéotron paie pour TVA Sports. Bell s'est dit «très heureux de la décision du CRTC», tandis que le Groupe TVA a exprimé sa déception. Les deux entreprises n'ont pas commenté davantage hier.

Par ailleurs, Bell Média négocie actuellement avec Vidéotron pour les redevances de RDS et TSN. Et même pour les redevances de TVA Sports chez Bell, l'entente imposée par le CRTC a une durée déterminée