La chute marquée du prix du pétrole brut et, du coup, du prix de l'essence à la pompe équivaut jusqu'à maintenant à une soudaine baisse d'impôt d'au moins 1 milliard de dollars dans le budget des ménages québécois, selon le président de la Banque Nationale, Louis Vachon.

Par ailleurs, avec la prochaine bonification des crédits d'impôt et des prestations fédérales aux familles, la conjoncture budgétaire des ménages québécois en 2015 s'annonce la plus favorable des dernières années, a indiqué M. Vachon pour expliquer le contexte d'affaires de la Nationale alors qu'il participait, hier à Toronto, à une conférence de grands investisseurs et d'analystes avec les présidents des principales banques canadiennes.

Une bonne partie des discussions au cours de cette conférence a porté sur l'impact sur les prochains résultats des banques du krach des revenus de l'industrie pétrolière - cliente majeure de leur division de marchés financiers - et du net ralentissement économique dans les provinces productrices de pétrole: l'Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador.

Dans le cas de la Banque Nationale, éprouvée en Bourse par ces inquiétudes pétrolières parmi les investisseurs, le président Louis Vachon a dû clarifier le risque pressenti pour le rendement de ses actifs dans l'Ouest canadien, constitués surtout de prêts et autres services financiers à l'industrie pétrolière.

Selon ses explications, la Nationale comptabilise pour 3 milliards de dollars de prêts à l'industrie pétrolière et gazière dans son bilan. Mais ce montant équivaut à seulement 2,7% de l'ensemble des prêts de la Nationale, «ce qui en fait la moins exposée parmi les six plus grandes banques canadiennes», selon M. Vachon.

N'empêche, a-t-il admis, la Nationale suit attentivement la santé financière de ses clients dans l'industrie pétrolière. «Comme toutes les banques, nous effectuons des «stress tests» financiers sur ces prêts à l'industrie pétrolière, avec des prix de 45 à 50$ le baril. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas identifié de risque de flux financiers négatifs parmi ces emprunteurs», a expliqué M. Vachon.

En contrepoids de ce risque pressenti, le président de la Nationale a souligné à ses interlocuteurs que le marché principal de la banque, soit les économies du Québec et de l'Ontario, bénéficiait, lui, de la baisse marquée du prix du pétrole.

Et que, par conséquent, la conjoncture de marché des services financiers (prêts, gestion de patrimoine, etc.) aux entreprises et aux ménages dans ces deux provinces s'annonce plus favorable pour la Nationale au cours des prochains trimestres.

«Au Québec seulement, l'effet combiné de la baisse de prix des produits pétroliers et des prochains bonis fiscaux du fédéral augure d'une première hausse significative du revenu net disponible des ménages après trois ou quatre ans de stagnation», a expliqué M. Vachon.

Quant à sa clientèle d'entreprises, la Banque Nationale entend bénéficier de la «reconstruction» du secteur manufacturier et exportateur au Québec et en Ontario grâce au regain de compétitivité provenant de la baisse du dollar canadien, en parallèle avec la chute du prix du pétrole.

«Le secteur manufacturier au Québec et en Ontario a été réduit de presque 20% depuis cinq ans, en raison surtout de la force du dollar canadien. Mais là, la conjoncture lui fournit une occasion de se rebâtir. Et pour la Banque Nationale, une occasion d'y participer avec nos divers services financiers aux entreprises», selon M. Vachon.

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Stress pétrolier parmi les banques

À l'instar du président de la Banque Nationale, les autres présidents et chefs de la direction de banques canadiennes présents à la conférence d'investisseurs, hier à Toronto, ont dû clarifier le «risque pétrolier» dans leur portefeuille de prêts et leurs prochains résultats d'exploitation.

À la Banque de Montréal, le chef de la direction, Bill Downe, a indiqué que son portefeuille de 5,9 milliards de dollars en prêts à l'industrie pétrolière avait déjà été soumis à des tests de solvabilité avec des prix du pétrole descendait jusqu'à 35$US le baril cette année et d'au plus 50$US l'an prochain.

«S'ils s'avèrent, ces scénarios pétroliers seraient les plus graves depuis 50 ans. Malgré tout, nous sommes confiants que nos pertes [sur prêts en défaut] demeureraient très, très gérables», a soutenu M. Downe. À la Banque Royale, qui est le plus important prêteur aux entreprises et aux ménages dans l'Ouest canadien, le chef de la direction, Dave McKay, a indiqué que le portefeuille de 9,6 milliards de prêts à l'industrie pétrolière était soumis à un «stress test» de solvabilité avec «avec un baril à 45$». Le risque de dommages au bilan de la Royale serait encore limité. Néanmoins, comme ses homologues, Dave McKay a dit s'attendre à un effet bénéfique dans les prochains résultats de la Banque de la baisse des coûts pétroliers dans l'économie du centre du Canada (Ontario, Québec), qui demeure de loin le plus grand marché de la Banque Royale.