Selon toute vraisemblance, c'est cet après-midi que la Réserve fédérale américaine annoncera la fin de sa troisième ronde de détente quantitative (DQ3), lancée il y aura bientôt deux ans.

En décembre dernier, la Fed avait commencé à réduire par tranche de 10 milliards US ses achats mensuels d'obligations à long terme du Trésor et de titres adossés à des créances hypothécaires, qu'elle faisait jusque là au rythme mensuel de 85 milliards US.

La dernière tranche de 15 milliards en vigueur depuis le début du mois cessera donc vendredi. Cela va avoir peu d'impact sur les marchés obligataires compte tenu de leur taille et de la prise en compte de la fin imminente de la DQ3 par les investisseurs et les spéculateurs.

En revanche, la Fed va sans doute continuer de réinvestir principal et intérêts des titres qu'elle détient et qui arrivent à échéance. Elle reconduira aussi la fourchette de 0% à 0,25% d'évolution de son taux directeur, en place depuis décembre 2008. C'est donc dire que la fin de la DQ3 ne marque pas le début d'un resserrement monétaire, qui serait le premier depuis 2006.

Il y a fort à parier aussi que le communiqué du Comité de politique monétaire (FOMC) faisant part de sa décision précise une ultime fois qu'il «sera sans doute approprié de maintenir la fourchette d'évolution du taux cible des Fed Funds (le taux directeur) durant une période considérable après la fin» de la DQ3.

Que signifie toutefois «une période considérable» quand la médiane des prévisions individuelles des 17 membres du FOMC (dont 10 sont votants) donne un taux directeur à 1,375% à la fin de 2015? Au rythme d'un quart de point de pourcentage par réunion, cela implique une première hausse de taux dès le printemps.

Le FOMC ne publie pas de projections cette fois-ci. Plusieurs spéculateurs parient qu'il va décaler quelque peu sa prévision médiane de taux lors de sa prochaine rencontre, à la mi-décembre.

Ils appuient leurs gageures sur plusieurs éléments.

La plus importante peut-être, c'est que les pressions inflationnistes sont absentes. En août, cela faisait 28 mois d'affilée que l'indice des prix des dépenses personnelles de consommation (la mesure préférée de l'inflation de la Fed) est sous la cible de 2% alors que les prix de l'essence pourraient encore diminuer.

En outre, la conjoncture internationale s'est assombrie depuis septembre; l'épidémie d'Ebola a atteint les États-Unis et l'Europe, les égorgeurs du groupe État islamique ont forcé les États-Unis et d'autres États à lancer une nouvelle offensive militaire, la Russie fait des siennes dans l'est de l'Ukraine tandis que l'économie européenne vacille de nouveau.

À l'opposé des marchés, la plupart des économistes sondés par l'agence Bloomberg sont d'avis que la Fed va bouger en première moitié de 2015.

Ils s'appuient sur l'accélération de l'expansion américaine. Ce n'est toutefois que demain que le département du Commerce publiera sa première estimation de la variation réelle du produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre. Les prévisionnistes tablent sur une augmentation annualisée d'un peu plus de 3%.

Ils prennent acte aussi de la baisse du chômage. La Fed a toutefois commencé à publier son nouvel indice des conditions du marché du travail qui montre que les stigmates de la Grande Récession sont toujours bien présents.

Enfin, il ne faudrait pas négliger la préoccupation de la présidente Janet Yellen pour les écarts de richesse qui ont recommencé à grandir depuis le début du cycle. Dans quelle mesure cela est-il lié à une politique monétaire excessivement accommodante?