Depuis cinq ans, le dollar canadien n'a jamais été aussi faible vis-à-vis de la devise américaine. Ce qui l'affaiblit actuellement est la même chose qui lui donne souvent des ailes: le prix des matières premières, et celui du pétrole en tête.

L'inquiétude au sujet du ralentissement de la croissance économique mondiale fait mal aux pays riches en ressources, explique Frédéric Mayrand, spécialiste des taux de change chez BNP Paribas Canada. «Même si l'économie canadienne s'est transformée, dès que le prix des matières premières baisse, le dollar écope», explique-t-il.

Cette inquiétude s'est transformée en une crise d'anxiété qui secoue actuellement les marchés boursiers et fait chuter le cours des matières de base, ce qu'on appelle les commodités.

Les devises des pays riches en ressources en subissent les contrecoups: l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la Norvège ont vu leur monnaie se déprécier au cours des derniers jours. La devise canadienne a souffert encore plus, à cause de la dégringolade spectaculaire du prix du pétrole.

En baisse depuis deux semaines, le prix du brut américain a atteint hier son niveau le plus bas depuis deux ans, à 81,78$US le baril. Le prix du Brent européen, à 83,78$US, est à son plus bas niveau en quatre ans.

Le prix du pétrole est affecté par l'abondance de l'offre et le ralentissement économique mondial, explique Mathieu d'Anjou, économiste chez Desjardins.

«Jusqu'à tout récemment, le dollar canadien baissait parce que le dollar américain montait, explique-t-il. Mais dans les derniers jours, il y a eu sur les marchés une vague de panique qui ne profite pas non plus au dollar américain.»

Le prix du pétrole devrait remonter du plancher où il se trouve actuellement, selon Mathieu d'Anjou. Chez Desjardins, la cible reste autour de 100$US.

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DE GRANDS ÉCARTS

Le dollar canadien a fait le grand écart à plusieurs reprises au cours des 10 dernières années. Voici quelques exemples

- Novembre 2007

Le huard a touché un sommet de 1,09$US le 6 novembre 2007. L'horizon était sans nuage pour l'économie canadienne, portée par un prix du pétrole qui venait de franchir la barre des 100$US le baril. Inversement, aux États-Unis, le secteur immobilier commençait à donner des signes inquiétants.

- Mars 2009

Le creux de 0,77$US atteint par la devise canadienne s'expliquait par la dégringolade du prix du pétrole, qui est passé d'un sommet de 150$US à 30$US en quelques semaines. En même temps, le dollar américain profitait de son statut de valeur refuge en pleine crise financière internationale.

- Juillet 2011

De retour au-dessus de la parité, à 1,06$US, le dollar canadien profitait de la reprise du marché des matières de base et de la politique de la Banque du Canada, qui avait amorcé le relèvement des taux d'intérêt.

- Octobre 2014

C'est une sorte de tempête parfaite qui s'abat sur la devise canadienne. En Europe, en Asie et même aux États-Unis, les principales économies mondiales montrent des signes inquiétants. Le prix du pétrole souffre de la demande qui ralentit en même temps que de l'augmentation de l'offre mondiale.