L'arrivée d'opérateurs de téléphonie mobile virtuels (MVNO) dans le paysage canadien ne permettrait pas d'accroître la concurrence dans le secteur du sans-fil, croit la présidente et chef de la direction de Vidéotron, Manon Brouillette.

Au dernier jour des audiences du Conseil canadien de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) sur l'examen des services sans-fil mobiles de gros, vendredi, cette dernière a exhorté l'organisme fédéral à ne pas se laisser «leurrer» par cette piste de solution.

«Nous en avons fait l'expérience avant de lancer notre propre réseau en septembre 2010, a-t-elle dit. Après quatre années, nous ne comptions que 60 000 abonnés et notre impact sur le marché québécois était marginal.»

Les MVNO louent des services d'accès auprès d'entreprises de télécommunications sans fil dotées d'installations.

Mme Brouillette a ainsi réfuté les arguments du président et chef de la direction de Cogeco Câble [[|ticker sym='T.CCA'|]], Louis Audet, qui avait plaidé pour ce genre de modèle, la semaine dernière, avant le début des audiences.

M. Audet faisait valoir qu'il y avait actuellement environ 800 opérateurs virtuels à travers le monde et que l'adoption de ce modèle au Canada inciterait plusieurs entreprises à se lancer dans le secteur du sans-fil.

Le patron de Cogeco Câble souhaitait une réglementation qui permettra, à des conditions déterminées, l'accès obligatoire aux réseaux sans fil des compagnies existantes.

M. Audet souhaite que le CRTC s'inspire de l'accès à Internet, où de petits fournisseurs sont en mesure d'offrir des forfaits en utilisant les réseaux de plus grandes entreprises comme Bell et Vidéotron, une filiale de Québecor [[|ticker sym='T.QBR.B'|]].

Toutefois, Mme Brouillette estime qu'il serait «prématuré» et «illogique» de favoriser les MVNO, puisque cela viendra «contrecarrer» la capacité des nouveaux entrants à attirer de nouveaux clients nécessaires pour assurer leur rentabilité.

«Le modèle MVNO ne permet pas les attributs ainsi que la flexibilité nécessaires pour concurrencer un oligopole qui contrôle plus de 90% du marché», a-t-elle affirmé.

Mme Brouillette a repris le discours du président et chef de la direction de Québecor, Pierre Dion, qui souhaite voir Ottawa réviser sa politique sur les frais d'itinérance.

Ces frais sont par exemple facturés à une entreprise ayant recours au réseau d'une autre compagnie afin d'offrir du service sans fil dans des zones qui ne sont pas couvertes par son spectre de fréquences.

«Nous devons pouvoir bénéficier de tarifs d'itinérance basés sur le coût véritable d'utilisation des réseaux, sinon, nous ne pourrons jamais concurrencer l'oligopole», a-t-elle expliqué.

C'est, selon Mme Brouillette, ce qui permettrait l'arrivée d'un quatrième joueur à l'échelle nationale afin de concurrencer Rogers [[|ticker sym='T.RCI.B'|]], Bell [[|ticker sym='T.BCE'|]] et Telus [[|ticker sym='T.T'|]].

D'après la dirigeante de Vidéotron, la méthode imposée par la loi C-31 pour plafonner les tarifs d'itinérance «rate la cible».

«Les prix de détail moyens sont composés d'éléments de coûts qui n'ont rien à voir avec l'itinérance, croit-elle. Par exemple, ces prix incluent les coûts de subvention d'appareils (et) les coûts reliés au marketing.»

Ultimement, Vidéotron, qui compte quelque 550 000 clients au Québec, aimerait déployer son réseau en Ontario, en Alberta ainsi qu'en Colombie-Britannique.

Jusqu'ici, la filiale du conglomérat québécois a dépensé 1,6 milliard de dollars dans ce dossier, dont 788 millions pour l'acquisition de spectre sans fil dans les provinces de l'Ontario, en Alberta ainsi qu'en Colombie-Britannique.

«Les membres de l'oligopole ne cesseront pas de faire obstacle aux nouveaux entrants à moins que vous n'utilisiez les pouvoirs à votre disposition pour les empêcher de continuer», a fait valoir Mme Brouillette au CRTC.

L'examen du CRTC visait à déterminer si le marché des services sans-fil mobiles de gros est suffisamment concurrentiel et, dans la négative, quelles mesures réglementaires sont nécessaires pour atteindre cet objectif.