Le groupe pharmaceutique américain Pfizer (PFE) a annoncé lundi qu'il renonçait à son projet d'offre d'achat de 117 milliards de dollars sur son concurrent anglo-suédois AstraZeneca (AZN), après que celui-ci eut rejeté un montant qui aurait constitué la plus grosse transaction du secteur.

«Après le rejet du conseil d'administration d'AstraZeneca de (son) offre», Pfizer a indiqué dans un communiqué qu'il n'avait «pas l'intention de faire une offre» sur la société.

La transaction aurait constitué un record dans le secteur au niveau mondial et aurait redonné à Pfizer le leadership mondial des laboratoires pharmaceutiques devant le suisse Novartis.

Pfizer avait jusqu'à lundi 16h00 GMT pour répondre au rejet d'AstraZeneca.

«Nous continuons de croire que notre dernière proposition était très convaincante et qu'elle valorisait AstraZeneca à sa juste valeur au vu des informations à notre disposition», poursuit Pfizer qui rappelle que l'opération visait «un renforcement» de sa stratégie.

AstraZeneca avait annoncé la semaine dernière avoir rejeté une ultime proposition de rachat améliorée à 55 livres sterling par action, soit environ 117 milliards de dollars.

Dans un communiqué lundi, Leif Johansson, le président du conseil d'administration d'AstraZeneca prend acte du retrait de l'offre de son concurrent en «saluant l'opportunité de continuer à croître comme une société indépendante».

«Nous sommes concentrés sur la réalisation de notre stratégie», ajoute le groupe insistant sur ses perspectives «attractives» de croissance grâce à ses produits en développement.

La direction d'AstraZeneca avait refusé catégoriquement de négocier les propositions de son concurrent jugeant qu'elles le sous-évaluaient et étaient plus motivées par des raisons fiscales que stratégiques.

Selon la réglementation britannique sur les fusions et acquisitions, Pfizer aura les mains liées pendant six mois pour présenter une nouvelle offre non sollicitée, mais AstraZeneca pourra décider de reprendre des discussions au bout de trois mois.

Le groupe avait en effet laissé la porte ouverte à une offre supérieure à 58,85 livres par titre dans le futur.

«Nous avons rejeté la proposition finale de Pfizer parce qu'elle est inadéquate et aurait représenté des risques significatifs pour les actionnaires, tout en ayant de graves conséquences pour l'entreprise, nos employés et "les sciences du vivant" au Royaume-Uni, en Suède et aux États-Unis», avait expliqué le 19 mai Leif Johansson.

Le conseil d'administration n'aurait été prêt à recommander une offre que si celle-ci avait été plus de 10% supérieure au montant de l'avant-dernière proposition formulée par Pfizer, qui était de 53,50 livres par action, indique AstraZeneca, attendant ainsi plus de 58,85 livres par titre.

«Déception»

Dans son communiqué lundi, Pfizer, le numéro un du secteur aux États-Unis, ne dit pas s'il est ouvert à de nouvelles discussions. Le groupe américain avait promis qu'il n'avait pas l'intention de faire une offre d'achat hostile.

Du côté d'AstraZeneca, les actionnaires ne présentaient pas un front uni et certains pourraient faire pression pour moins d'intransigeance.

Parmi eux, le gestionnaire d'actifs Schroders, qui détient environ 2% du groupe, a fait part de sa «déception après le rejet rapide par le conseil d'administration d'AstraZeneca de la dernière offre de Pfizer».

«Le plus probable à mon avis est que la pression des actionnaires va pousser AstraZeneca a réengagé des pourparlers avec Pfizer», estimait Mark Clark, analyste chez Deutsche Bank vendredi, alors que l'opération paraissait déjà tomber à l'eau.

Le titre AstraZeneca a progressé de 1,2% en clôture vendredi pour terminer à 43,28 livres tandis que Pfizer était en retrait de 0,6% à 29,49 dollars. Le marché boursier était fermé lundi aux États-Unis pour cause de jour férié.

AstraZeneca, en difficulté ces dernières années avec la perte d'exclusivité de certains médicaments, doit prouver qu'il peut rester indépendant en développant comme il l'a promis de nouvelles molécules innovantes contre le diabète, l'asthme ou encore les cancers.

Quatrième méga-acquisition en 14 ans pour Pfizer, ce projet de rachat aurait propulsé à nouveau le groupe américain au rang de numéro un mondial du secteur, une place qu'il avait perdue après l'érosion des ventes due à la perte de son exclusivité sur des médicaments vedettes comme le Lipitor ou le Viagra.