Sous pression des parlementaires britanniques, Pfizer (PFE), qui n'exclut pas de réviser son offre, a reconnu mardi qu'il supprimerait des emplois et baisserait le budget de recherche s'il parvenait à racheter AstraZeneca.

«Je ne suis pas assis là à vous dire que nous pouvons devenir plus efficaces sans réduction d'emplois», a déclaré le PDG du géant américain de la pharmacie, Ian Read, aux membres de la Commission des entreprises, de l'innovation et des compétences de la Chambre des communes.

«Il y aura des suppressions d'emplois, quelque part», a-t-il ajouté, dans une atmosphère tendue, mais «ce que je ne peux pas vous dire c'est combien et où». «Par expérience, j'ai quelques idées sur le pourcentage de réduction des coûts que nous chercherons mais il est vraiment trop tôt» pour en parler, a-t-il encore dit.

Un rachat d'AstraZeneca par Pfizer, qui serait le plus gros de l'histoire du secteur et le plus gros d'une entreprise britannique par un groupe étranger, suscite des craintes en Grande-Bretagne pour les emplois et la place de la recherche scientifique dans le pays.

Intervenant avant M. Read devant la commission, Tony Burke, responsable du syndicat Unite, a souligné que les salariés étaient «très inquiets» par «les antécédents de Pfizer en terme de suppressions d'emplois».

Pfizer avait en effet supprimé plus de 50.000 emplois en quatre ans après le rachat de la biotech Wyeth en 2008-2009. Le groupe a notamment décidé en 2011 de fermer son centre de recherche de Sandwich dans le sud-est de l'Angleterre.

Le PDG de Pfizer a en revanche rappelé que Pfizer s'était engagé à ce qu'au moins 20% des emplois de R&D d'un éventuel groupe fusionné soient basés au Royaume-Uni.

Le groupe a également promis d'établir la résidence fiscale du nouvel ensemble et son siège européen au Royaume-Uni et d'achever la construction du nouveau siège et centre de recherche d'AstraZeneca à Cambridge.

Des promesses, légalement contraignantes pour une durée de cinq ans, qui sont «sans précédent», a affirmé M. Read.

Baisse du budget de recherche

Le patron de Pfizer a en outre dû indiquer aux parlementaires que le futur groupe fusionné aurait un budget de recherche et développement en baisse.

«Je ne prévois pas que le total combiné reste le même. Je pense qu'il sera plus bas, dans une mesure que je ne peux pas préciser», a-t-il souligné, alors que les deux groupes consacrent au total 12 milliards de dollars à la recherche.

Déterminé à emporter l'adhésion d'AstraZeneca, Pfizer a indiqué mardi qu'il était prêt à «travailler» avec ses dirigeants en vue de se mettre d'accord «sur des termes et une structure de l'opération optimaux», n'excluant donc pas une révision de son offre.

AstraZeneca, qui dénonce la «tentative opportuniste» de Pfizer, refuse pour le moment de céder à ses avances. Le britannique a rejeté le 2 mai une nouvelle proposition de Pfizer à 106 milliards de dollars après avoir déjà dit non en janvier à une offre de près de 99 milliards.

«Le problème avec une fusion de cette ampleur est la distraction qu'elle entraîne», a jugé devant la commission parlementaire son directeur général, le Français Pascal Soriot.

«Que dirions-nous à une personne dont le père est mort d'un cancer du poumon car l'un de nos traitements a été retardé essentiellement car pendant ce temps, nos deux groupes s'employaient à réduire leurs impôts et leurs coûts ?», a-t-il lancé alors que la réduction de la feuille d'impôts de Pfizer est vue comme l'une des raisons principales de sa volonté de racheter AstraZeneca.

M. Soriot a néanmoins estimé qu'il lui était «impossible de dire» sur le principe qu'AstraZeneca n'accepterait «jamais d'offre» de rachat.

Face au refus de sa cible, Pfizer, qui a jusqu'au 26 mai pour convaincre sa proie, lancer une offre hostile ou abandonner, a assuré ne pas avoir «encore décidé de sa stratégie».

«J'ai des options mais je n'ai pris aucune décision», a insisté M. Read, ne fermant donc pas la porte au lancement d'une offre hostile.