Le géant américain de la pharmacie Pfizer a relevé vendredi son offre sur AstraZeneca à 106 milliards de dollars mais continue de se heurter au refus catégorique du groupe britannique, qui défend vigoureusement son indépendance.

Après une offensive de charme menée par son PDG Ian Read dans la City cette semaine, le numéro un mondial de la pharmacie a dévoilé vendredi une nouvelle offre à 50 livres par action, non sans avoir consulté les principaux actionnaires d'AstraZeneca.

Soit un montant total de 63 milliards de livres (environ 106 milliards de dollars), ce qui en ferait l'un des plus gros rachats jamais réalisés dans le secteur s'il se concrétisait dans le contexte actuel de fièvre des fusions-acquisitions.

Mais le Britannique ne l'entend pas de cette oreille et lui a opposé un nouveau refus catégorique.

«Les termes financiers et autres décrits dans la proposition sont inadéquats, sous-évaluent substantiellement AstraZeneca et ne sont pas une base sur laquelle engager (des discussions) avec Pfizer», a-t-il balayé d'un revers de la main dans un communiqué.

«Le conseil d'administration a donc rejeté la proposition sans hésitation», a déclaré son président, Leif Johansson, réaffirmant la force d'AstraZeneca «en tant qu'entreprise indépendante».

Engagé dans une profonde restructuration qui commence à porter ses fruits, AstraZeneca ne veut pas à offrir à Pfizer les bénéfices de ses médicaments prometteurs en développement.

Confronté à une perte des brevets sur des produits vedettes comme l'anticholestérol Lipitor, l'américain lorgne en effet les percées du Britannique dans le créneau à fort potentiel de l'immuno-oncologie ainsi que son médicament pour le coeur Brilinta ou ses traitements contre le diabète ou les maladies respiratoires.

AstraZeneca avait déjà rejeté en janvier une première offre de Pfizer, révélée lundi, à 46,61 livres par titre, soit près de 99 milliards de dollars.

À la Bourse de Londres, le titre AstraZeneca, qui s'est envolé depuis les premières rumeurs de rachat de Pfizer il y a deux semaines, restait de marbre après le rejet de cette offre.

Au-delà des actionnaires, Pfizer tente de convaincre le gouvernement britannique, resté discret jusque-là. Son PDG a écrit une lettre au premier ministre David Cameron pour l'assurer de l'«engagement de long terme» du groupe à l'égard du Royaume-Uni s'il rachetait AstraZeneca.

L'Américain promet notamment qu'il établira la résidence fiscale du nouvel ensemble et son siège européen au Royaume-Uni, qu'il achèvera la construction du nouveau siège et centre de recherche d'AstraZeneca dans la ville universitaire de Cambridge et qu'au moins 20% des emplois de recherche et développement du groupe fusionné seront basés dans le pays.

Réagissant pour la première fois dans cette affaire, Downing Street a fait savoir que David Cameron jugeait qu'un éventuel rachat était du ressort «des conseils d'administration et des actionnaires des deux groupes». Une position bien loin de l'activisme du gouvernement français dans le dossier Asltom.

Mais il examinera tout de même «avec attention» les promesses de Pfizer pour voir si elles «offrent une protection suffisante de nos priorités». À savoir s'assurer que la recherche et l'industrie pharmaceutique gardent une place de premier plan dans le pays.