ANALYSE - On dénombre davantage d'emplois en mars qu'en février au Canada dans son ensemble, et au Québec en particulier.

L'ajout de 42 900 emplois, d'un océan à l'autre, dont 15 100 au Québec, est plus que bienvenu.

Les détails de la volatile Enquête sur la population active (EPA) de Statistique Canada font cependant ressortir que le marché du travail a encore du mou, même si l'expansion économique pancanadienne étonne par sa relative robustesse.

Ainsi, 39 300 des nouveaux emplois capturés par l'EPA sont dans le secteur public. La production de biens a même supprimé 15 600 emplois, dont 9200 en usines.

Au Québec, l'hémorragie du secteur manufacturier (-14 300) efface tous les gains de l'année. Il est vrai que les données de la production manufacturière avaient reflété une forte accumulation des stocks en début d'année qu'il a bien fallu écouler.

Cette réserve faite, les 15 100 emplois de plus au Québec effacent en bonne partie les chiffres affreux de février. Au final, le mois dernier, on comptait 2300 emplois de plus qu'en décembre et 31 000 de plus qu'il y a un an.

Mieux, il y a eu transformation d'emplois à temps partiel en postes à temps plein dont le nombre s'est accru de 26 200 depuis janvier.

Et pour couronner le tout, pour la première fois depuis plusieurs mois, on comptait en mars moins de chômeurs qu'un an plus tôt.

Bref, les chiffres de mars renversent complètement la tendance dangereuse observée en janvier et février, mais le portrait d'ensemble n'est pas encore reluisant.

Le taux de chômage a diminué de deux crans, à 7,6 %, tandis que le taux d'emploi gagnait deux crans, à 60,2 %.

À l'échelle canadienne aussi, la situation paraît meilleure, malgré la faiblesse du secteur manufacturier. Même si deux nouveaux emplois sur trois sont à temps partiel, le taux de chômage a diminué d'un cran pour repasser sous la barre des 7,0 %, le creux du présent cycle. Le taux d'emploi a gagné un cran, à 61,7 %.

L'addition de postes à temps partiel explique que les nouveaux emplois ont surtout trouvé preneur chez les 15-24 ans (32 500, dont 11 200 au Québec).

Pour l'ensemble du trimestre, le nombre d'heures travaillées a progressé de 1,3 % en rythme annuel par rapport à l'automne. C'est le rythme le plus rapide en un an.

La rémunération horaire moyenne des employés permanents progressait, quant à elle, au rythme annuel de 2,4 %, en repli de trois dixièmes. C'est néanmoins un point de pourcentage de plus que le rythme d'inflation, ce qui devrait permettre de soutenir le niveau présent de la consommation des ménages.

Le repli observé dans la production de biens en mars ne devrait pas trop inquiéter, à la lumière des chiffres publiés chez nos voisins américains.

Les employeurs non agricoles ont ajouté 192 000 salariés à leurs effectifs, ce qui a permis un repli d'un cran du taux de chômage, à 6,7 %, selon les données du Bureau of Labor Statistics. Des révisions positives ont aussi été apportées aux données de janvier et de février. Depuis un an, il s'est créé en moyenne 183 000 emplois aux États-Unis, mais il reste toujours 10,5 millions de personnes à la recherche active d'un emploi.

Le taux de participation des 16 ans et plus au marché du travail reste historiquement faible, à 63,2 %, de même que le taux d'emploi, à 58,9 %, soit 1,3 point de moins que le taux du Québec.

Si Statistique Canada utilisait la méthodologie américaine qui place à 16 ans au lieu de 15 ans le seuil de la population active, alors le taux de chômage canadien diminuerait à 6,0 %, tandis que le taux d'emploi monterait à 62,2 %.

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Ce qu'ils en pensent

« La moyenne mobile sur six mois de la création d'emplois s'élève maintenant à 9700 postes, un niveau jugé encore trop faible par rapport à la croissance économique observée au pays. Dans ces conditions, la création d'emplois pourrait de nouveau dépasser la barre des 30 000 postes en avril. »

- Benoit P. Durocher, Desjardins, Études économiques

« Environ un tiers seulement [des emplois créés au cours des six derniers mois] provient du secteur privé. Il n'en demeure pas moins que la transition en cours de l'emploi dans le secteur public à l'emploi dans le secteur privé est encourageante. »

- Matthieu Arseneau, Banque Nationale, marchés financiers

« Après un hiver particulièrement glacial, l'embâcle qui emprisonnait l'emploi paraît enfin brisé. Le niveau d'emploi revient à des rythmes plus confortables, 1,1 % par année, soit un cran de plus que la croissance moyenne de la population active des dernières années. »

- Douglas Porter, BMO, Marchés des capitaux