La stagnation, restons polis, du marché du travail au Québec depuis deux ans et demi maintenant a des conséquences fâcheuses pour un grand nombre de ménages acculés à la faillite ou à un concordat avec leurs créanciers.

Depuis un an maintenant, le nombre de faillites personnelles est en hausse au Québec.

Selon les observations faites par Marc Pinsonneault, économiste principal à la Banque Nationale, les faillites personnelles et les propositions faites aux créanciers sont en hausse de 20,6% depuis 12 mois.

Pour s'assurer qu'il s'agit bel et bien d'une tendance lourde, M. Pinsonneault a fondé ses calculs sur la moyenne mobile de trois mois depuis un an des données du Bureau du surintendant des faillites.

Un constat troublant s'impose: l'écart entre la variation des faillites et des propositions concordataires au Québec et en Ontario est à son niveau le plus élevé depuis janvier 1999.

Pourquoi une telle détérioration?

«Par le passé, les faillites s'expliquaient par la destruction du nombre d'emplois», rappelle-t-il.

Pareille observation est facile en période de récession classique où il y a destruction nette du nombre d'emplois. Cela signifie que le nombre d'emplois créés est plus petit que le nombre d'emplois supprimés.

Statistique Canada ne précise pas combien d'emplois sont perdus chaque mois, ni dans l'Enquête sur la population active (EPA) ni dans celle sur le nombre de salariés non agricoles.

Il faut donc faire l'hypothèse plausible que le nombre d'emplois perdus augmente depuis quelque temps alors que le total paraît stable, ou légèrement à la hausse.

C'est ce que fait M. Pinsonneault. Il observe que le niveau d'emploi au Québec progresse de 0,3% en rythme annuel depuis le début de 2011. Bref, beaucoup d'emplois détruits sont remplacés par un nombre à peine supérieur d'emplois dans d'autres segments de l'économie.

Ainsi, depuis 12 mois (d'août 2012 à août 2013), la création nette d'emplois au Québec a été limitée à 5200, contre 246 100 d'un océan à l'autre.

Ce chiffre cache le fait qu'on en compte 25 700 de moins en usines, 19 300 dans les services d'enseignement, 8900 dans le transport et l'entreposage et 5400 dans les services financiers, 4 segments où les salaires excèdent souvent la moyenne.

Ces emplois perdus ont, par exemple, été remplacés par 20 500 additions dans l'hébergement et la restauration, 21 500 dans les soins de santé et d'assistance sociale et 14 900 dans le commerce.

Ce sont avant tout les gens qui perdent leur emploi et ne parviennent pas à en trouver un autre à rémunération équivalente qui voient leurs finances personnelles fragilisées.

La stagnation du marché du travail au Québec a pour effet de faire augmenter le taux de chômage, en particulier dans la région métropolitaine, qui accueille la grande majorité des immigrants, dont la plupart cherchent activement du travail.

Durant la récession de 2008-2009, le taux de chômage de Toronto avait dépassé celui de Montréal. Il en allait de même pour le taux de l'Ontario par rapport à celui du Québec.

En août, le taux de chômage à Montréal s'élevait à 8,4% et avait peu bougé en 1 an. Celui de Toronto est passé de 8,5% à 7,8% durant la même période.

À l'échelle provinciale, le taux de chômage du Québec est passé de 7,6% à 7,9% en 1 an, alors que celui de l'Ontario a évolué en sens inverse, de 8,0% à 7,5%.

Il sera intéressant de voir vendredi si ces fâcheuses tendances amorcées sous le gouvernement de Jean Charest perduraient en septembre sous celui de Pauline Marois.