Le site de microblogues Twitter a publié jeudi son très attendu projet d'entrée en Bourse avec une collecte de fonds fixée à un milliard de dollars maximum, révélant qu'il était déficitaire malgré une croissance explosive.

Le document d'enregistrement en vue de l'introduction sur le marché, consultable sur le site internet du gendarme boursier américain (SEC), précise que l'opération aura lieu «aussi tôt que possible».

Le groupe doit toutefois respecter un délai d'au moins 21 jours avant d'entamer son «roadshow», la tournée des investisseurs institutionnels par ses dirigeants afin de leur présenter les futurs titres. L'entrée sur le marché ne devrait donc pas avoir lieu avant la fin octobre ou le début novembre.

Comme il est d'usage à ce stade de la procédure, une série de détails, tels le nombre ou le prix des actions, ne sont pas encore déterminés. Le document donne toutefois un ordre de grandeur provisoire, estimant que la levée de fonds pourrait monter jusqu'à un milliard de dollars.

En publiant son projet d'entrée en Bourse, Twitter donne surtout l'opportunité aux investisseurs d'avoir pour la première fois des détails sur ses données financières, jusqu'ici un secret bien gardé.

Le réseau revendique 218 millions d'utilisateurs actifs au moins une fois par mois à la fin juin, ce qui représente selon lui une progression de 44% sur un an. Au quotidien, plus de 100 millions de personnes publient en moyenne 500 millions de «tweets», ces messages de 140 caractères maximum qui font la spécificité du réseau.

Le chiffre d'affaires a pour sa part triplé l'an dernier, à 317 millions de dollars, et il atteint déjà 253,6 millions pour les six premiers mois de cette année.

À titre de comparaison, le champion mondial du secteur Facebook a réalisé au premier semestre, avec son plus d'un milliard de membres, quelque 3,3 milliards de dollars de chiffre d'affaires.

Rentabilité incertaine

Twitter souligne aussi sa force dans le mobile, un indicateur suivi de près par les investisseurs du secteur internet et qui a longtemps été l'un de leurs grands sujets d'inquiétude chez Facebook. Le réseau dit avoir généré plus de 65% de ses revenus publicitaires du deuxième trimestre avec ses accès sur téléphone intelligent et tablettes (contre 41% chez son rival).

Twitter avoue en revanche une perte nette de près de 80 millions de dollars sur l'ensemble de 2012, et d'encore 69,3 millions pour le seul premier semestre 2013.

«Nous pourrions ne pas être capables de devenir ou de rester rentables», prévient-il dans la section du document où il détaille les risques auxquels s'exposent ses futurs actionnaires.

«Notre performance financière est et restera déterminée de manière importante par notre capacité à augmenter le nombre d'utilisateurs et leur niveau d'engagement sur notre plateforme, de même que le nombre de publicités», y souligne-t-il.

Le groupe prévient en particulier que ses résultats pourraient souffrir si la quantité ou l'intérêt des contenus publiés sur sa plateforme diminuait, et s'il perd en pertinence pour ses utilisateurs.

Il souligne aussi sa dépendance à la publicité, qui représentait 85% du chiffre d'affaires de l'année 2012 et 87% de celui du premier semestre 2013.

Le défi pour Twitter sera d'éviter de répéter les erreurs de Facebook, dont l'introduction sur la plateforme électronique Nasdaq l'an dernier s'était avérée catastrophique: la première séance avait été émaillée de multiples problèmes techniques, et le cours de l'action s'était très vite effondré, fondant de moitié en quelques mois.

Le cours de l'action Facebook n'est repassé que cet été au-dessus de son prix d'introduction de 38 dollars, mais semble avoir redressé la barre, avec encore cette semaine un plus haut historique à 51,24 dollars.

Twitter ne précise pas dans l'immédiat s'il optera lui aussi pour le Nasdaq ou pour la place concurrente du New York Stock Exchange, indiquant juste qu'il sera coté sous le symbole «TWTR».

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Les géants d'internet entrés à Wall Street depuis 2 ans

> Facebook

Annoncée en grande pompe, l'entrée à Wall Street en mai 2012 du groupe de Mark Zuckerberg, marquée par d'importants problèmes techniques, a été désastreuse. Valorisé initialement à 16 milliards de dollars --soit 38 dollars par action--, le premier réseau social au monde a vu son titre plonger sous les 20 dollars au cours de l'année qui a suivi. L'action a finalement retrouvé son niveau d'introduction en juillet dernier, et a volé de record en record depuis, dopée par la hausse des recettes de Facebook sur les appareils mobiles. L'action a clôturé jeudi à 49,18 dollars.

> Linkedin

Le réseau social pour les professionnels est l'une des stars technologiques de Wall Street depuis son introduction en mai 2011, à 45 dollars par action. La valeur de son titre a plus que doublé le jour de son entrée en Bourse et s'est envolée depuis, s'établissant jeudi à la clôture à 245,07 dollars.

> Groupon

Le spécialiste des bonnes affaires sur internet a débuté ses cotations en novembre 2011, levant alors 700 millions de dollars dans ce qui était à l'époque la plus importante introduction en Bourse d'un groupe internet depuis Google. Coté 20 dollars lors de son lancement sur le Nasdaq, la société a connu d'importantes difficultés financières depuis et son action a fondu: elle a fini jeudi à 11,30 dollars. Son fondateur Andrew Mason a été démis de son poste de directeur général en février 2013.

> Yelp

Introduit initialement à 15 dollars par action, le titre du site Yelp, spécialisé dans les critiques de restaurants ou de commerces locaux, a bondi depuis mars 2012 pour clore à 71,02 dollars jeudi à New York. Fondé en 2004, il offre des commentaires écrits par les internautes pour des adresses aux États-Unis, au Canada et en Europe occidentale.

> Pandora

La radio personnalisable sur internet est entrée à Wall Street en juin 2011, levant 235 millions de dollars --soit 16 dollars par action. Échangé sous son prix d'introduction pendant longtemps, son titre a depuis dépassé ce niveau, s'établissant à 26,44 dollars à la clôture jeudi.

> Zynga

Valorisé 7 milliards de dollars lors de ses débuts à Wall Street en décembre 2011, le créateur de jeux en réseaux a vu la valeur de son titre s'effondrer depuis: offert à 10 dollars, il a fini à 3,67 dollars jeudi.