Les indicateurs économiques se suivent mais ne se ressemblent pas, ce qui est de nature à conforter la grande prudence de la Banque du Canada dans sa conduite de la politique monétaire.

Alors qu'on apprenait vendredi que la production manufacturière, telle que mesurée par le produit intérieur réel par industrie, avait reculé au printemps pour le quatrième trimestre d'affilée, on indiquait hier que l'indice PMI manufacturier de RBC était demeuré en août au-dessus de la barre de 50 qui délimite l'expansion de la contraction.

À 52,1, il reflète une progression bien faible, mais une progression tout de même. Il frôle la barre de 50 en fait depuis le début de l'année.

Cela signifie qu'il subsiste des capacités de production inutilisées ou qui ne tournent pas à plein dans le secteur manufacturier. En fait, la production en usine est encore en deçà de quelque 8% de son niveau d'avant récession. C'est le seul segment de l'économie, avec les volumes d'exportations, à ne pas connaître encore d'expansion.

À l'échelle de toute l'économie, le rythme annualisé d'expansion de 1,7% au deuxième trimestre suggère que l'écart entre la production réelle et son potentiel s'est même élargi au printemps.

La Banque du Canada estime que le rythme optimal de croissance de l'économie sans surchauffe inflationniste est de 2,1%.

Pour trouver un signe plus encourageant de relance prochaine de la production en usine, peut-être vaut-il mieux se tourner vers l'ISM manufacturier des États-Unis. À 55,7 le mois dernier, il pointe nettement vers l'expansion. Fait plus encourageant peut-être, il s'agit de sa marque la plus élevée en deux ans.

Les fournisseurs canadiens des fabricants américains ne pourront que se réjouir de cette nouvelle.

Quant aux autorités monétaires, elles joueront les saint Thomas. Après tout, les données de juillet sur l'emploi ont été décevantes, l'inflation reste bien ancrée sous la barre des 2%, la balance commerciale du Canada est encore dans le rouge, et le niveau d'endettement des ménages est encore si élevé que le surintendant des institutions financières étudie comment resserrer les conditions d'octroi de prêts.

Voilà pourquoi on doit s'attendre à ce que la Banque reconduise tel quel le libellé de la partie de son communiqué du 17 juillet où elle annonce le maintien de son directeur à 1%, en place depuis septembre 2010: «Tant que l'économie canadienne affichera une marge importante de capacités inutilisées, que les perspectives en matière d'inflation resteront faibles et que l'évolution des déséquilibres dans le secteur des ménages continuera d'être constructive, la détente monétaire considérable en place actuellement demeurera appropriée. Au fil du temps, à mesure que la normalisation de ces conditions s'opérera, on peut s'attendre aussi à une normalisation graduelle du taux directeur, de façon à atteindre la cible d'inflation de 2%.»

Il ne faut pas compter sur le gouverneur Stephen Poloz pour fixer des seuils de taux de chômage qui pourraient servir de déclencheur d'une hausse des taux.

Le libellé actuel laisse à la Banque beaucoup de latitude tout en indiquant aux spéculateurs que le prochain geste qu'elle fera tôt ou tard sera une hausse et non une baisse de son taux directeur. Quant à d'éventuels outils non conventionnels, il faudra attendre au moins à la prochaine récession pour imaginer que la Banque puisse peut-être y recourir.

On ne peut que s'en réjouir.