Les actions des journaux canadiens, dont ceux de Postmedia Network Canada Corp., affichent les plus piètres performances en Amérique du Nord, et rien n'indique qu'ils seront alimentés par des milliardaires comme Jeff Bezos, contrairement à leurs pairs américains.

L'action de Postmedia, éditeur du National Post, a perdu 25% de sa valeur cette année. Il s'agit du plus important déclin parmi 15 entreprises nord-américaines propriétaires de journaux compilées par Bloomberg. Torstar Corp., éditeur du Toronto Star, le quotidien le plus vendu au Canada, a aussi perdu 25%, alors que Glacier Media Inc., éditeur de journaux dans de plus petits marchés, a perdu 18%.

À l'exception de la société McClatchy Co., de Sacramento en Californie, les actions des journaux américains ont toutes gagné en valeur cette année, grâce à leur acquisition par des milliardaires. Bezos, fondateur et PDG de la société Amazon.com Inc., a accepté de payer 250 millions US pour faire l'acquisition du Washington Post le 5 août dernier, deux jours après que John Henry, le milliardaire propriétaire des Red Sox de Boston, eut conclu une entente visant l'acquisition du Boston Globe. Ce fut ensuite au tour de Warren Buffett, troisième homme le plus riche du monde, de bâtir un empire à l'aide de journaux ayant pour territoire de petites villes, au cours des deux dernières années.

«Le fait que de l'argent d'investisseurs avisés serve à acquérir des journaux aux États-Unis a probablement contribué au soutien de ces publications, selon ce qu'a affirmé Paul Sweeney, analyste chez Bloomberg Industries, en entrevue téléphonique le 15 août dernier. Vous ne bénéficiez pas de cette réalité au Canada. Ça fait toute une différence.»

Susciter l'intérêt

La cible de prix moyen des éditeurs américains suggère que les actions pourraient augmenter de 18% au moment où les transactions concernant les journaux raniment l'intérêt au sein de l'industrie, selon un rapport de Paul Sweeney publié le 6 août.

Paul Godfrey, PDG de Postmedia, entreprise basée à Toronto, a affirmé que la tendance des riches investisseurs achetant des journaux pourrait s'amener au Canada au cours des cinq prochaines années.

Au Canada, on retrouve aussi de richissimes individus propriétaires de journaux. Pensons seulement au Globe and Mail, publié à l'échelle du pays, détenu par la famille Thomson, la plus riche du pays.

L'exode des annonceurs quittant les journaux pour adopter les plateformes numériques telles Google et Facebook représente des années de revenus en baisse pour les éditeurs de journaux de part et d'autre de la frontière. Aux États-Unis, une chute de 60% des revenus publicitaires depuis 2005 a poussé les éditeurs à exiger des lecteurs qu'ils paient le contenu en ligne. Une décision qui commence à peine à compenser le déclin des revenus publicitaires, selon un rapport publié le 15 août par Bloomberg Industries.

Abonnés numériques

«Plusieurs tendances observées du côté des journaux américains vont éventuellement toucher les journaux canadiens, selon Lorenzo DeMarchi, directeur des finances de Torstar. L'expérience vécue avec les verrous d'accès payant est venue un peu plus tôt et, dans l'ensemble, les résultats ont été plus encourageants puisqu'ils ont commencé plus tôt.»

Les journaux canadiens ont pris plus de temps à implanter un système d'abonnements aux versions numériques. Par exemple, le Toronto Star et les journaux de Postmedia n'ont créé de verrou d'accès payant que cette année.

La Presse (qui appartient à Gesca, filiale de Power Corporation) a de son côté fait le pari de la gratuité par sa plateforme La Presse+, diffusée sur tablette numérique.