L'administration Obama a volé samedi au secours du groupe américain Apple dans la guerre des brevets qui l'oppose au sud-coréen Samsung, en annulant une décision qui l'aurait empêché de vendre certains produits aux États-Unis.

Le gouvernement américain a eu recours à un droit de veto qu'il n'avait plus employé depuis 1987 et a «décidé de désapprouver» une décision juridique défavorable à Apple prise en juin par la Commission américaine du commerce international (USITC), selon une lettre adressée à cet organisme par le représentant américain au Commerce, Michael Froman.

Saisie d'une plainte déposée par Samsung en août 2011, l'USITC avait estimé que certains téléphones intelligents iPhone, tablettes iPad et baladeurs iPod d'Apple violaient des brevets du groupe sud-coréen et interdit en conséquence leur importation depuis l'Asie, où ils sont fabriqués, vers les États-Unis. Cela revenait à empêcher le groupe américain de les vendre sur son marché domestique.

La décision était une victoire importante pour Samsung, qui s'oppose à Apple pour des affaires de brevets devant les tribunaux de plusieurs pays. Elle restait toutefois symbolique, car elle ne concernait que des produits relativement anciens d'Apple, notamment les iPhone 3 et 4 vendus par l'opérateur AT&T, et les tablettes iPad et iPad 2. Les produits les plus récents du groupe à la pomme, et donc les plus vendus comme son iPhone 5, n'étaient pas touchés.

Michael Froman précise dans sa lettre que sa décision ne présume pas de la violation ou non des brevets de Samsung, qui «peut continuer à faire valoir ses droits devant les tribunaux».

Il indique avoir pris en compte «les effets sur les conditions de la concurrence sur l'économie américaine et les effets sur les consommateurs américains». Il rappelle aussi l'importance de ne pas donner un «levier» trop grand aux groupes détenteurs de «brevets essentiels», qui pourraient utiliser la menace d'une interdiction de vente pour imposer des prix plus élevés que de raison à leurs concurrents pour l'usage de ces brevets dont ils ne peuvent pas se passer.

Un affrontement symbolique

«Nous applaudissons l'administration pour sa défense de l'innovation dans cette affaire symbolique», a réagi une porte-parole d'Apple. «Samsung avait tort d'abuser le système de brevets de cette manière.»

Sans surprise, le groupe sud-coréen s'est pour sa part dit «déçu».

«La décision de l'USITC reconnaissait de manière correcte que Samsung négociait de bonne foi (sur les conditions d'utilisation de ses brevets) et qu'Apple restait réticent à payer une licence», a indiqué un porte-parole.

La quasi-totalité des grands groupes technologiques s'accuse sur un continent ou un autre de violations de brevets. Si la majorité des batailles se jouent devant les tribunaux, l'USITC a été saisie à plusieurs reprises, certains estimant qu'il sera plus facile d'y obtenir une interdiction des produits des concurrents.

L'affrontement Apple-Samsung fait l'objet d'une attention toute particulière, car ils sont les deux acteurs dominants sur les marchés des téléphones intelligents et des tablettes, et aussi parce qu'à travers Samsung, Apple s'attaque indirectement à Google et à son système d'exploitation mobile Android (utilisé par toute une série de fabricants, mais dont le fabricant sud-coréen est devenu l'un des principaux porte-étendard).

Les résultats du combat entre les deux groupes ont jusqu'ici été assez variables selon les pays. Le veto gouvernemental de samedi n'est toutefois pas la première défaite de Samsung aux États-Unis.

À l'issue d'un grand procès l'été dernier en Californie, le groupe sud-coréen avait été jugé coupable de violation de toute une série de brevets d'Apple. Les jurés avaient estimé qu'il était redevable d'une énorme amende de 1,05 milliard de dollars. La juge chargée de l'affaire n'en a pour l'instant confirmé qu'une partie, environ 600 millions de dollars correspondant à des violations causées par 14 produits de Samsung. Les dommages causés par 8 appareils supplémentaires, tous des téléphones intelligents, doivent être recalculés lors d'un nouveau procès dont la date reste à fixer.