Il ne faut pas s'attendre à de grands changements dans le message que la Réserve fédérale américaine (Fed) livrera demain en reconduisant à la fois son taux directeur, qui évolue dans une fourchette de 0 à 0,25% depuis décembre 2008, et la troisième ronde de détente quantitative (DQ3), en place depuis décembre.

L'annonce surviendra quelques heures seulement après que le Bureau of Economic Analysis (BEA) aura annoncé que l'expansion en rythme annuel a sans doute été contenue entre 1,0 et 1,2% seulement, au deuxième trimestre, soit moins que la croissance de 1,8% enregistrée de janvier à mars.

Si cela se concrétise, ce sera le troisième trimestre d'affilée où l'économie américaine sous-performe la canadienne. On apprendra en même temps que la seconde a progressé de 0,2 à 0,4% en mai, ce qui la positionne bien pour un rythme d'expansion aux environs de 1,5% d'avril à juin.

Le BEA publiera aussi une mise à jour de ses données du produit intérieur brut réel, en remontant jusqu'à 1929. En considérant désormais la recherche et le développement comme un investissement et les oeuvres d'art (chanson, film, roman, etc.) comme un actif à long terme tant qu'elles rapportent des droits d'auteur, la taille de l'économie américaine s'en trouvera épaissie de 3% environ et reflétera mieux le poids de l'économie du savoir. En revanche, cette révision ne devrait pas gonfler beaucoup l'expansion du deuxième trimestre.

En juin, la Fed misait sur une certaine accélération de la croissance économique et de la création d'emplois lorsque son président Ben S. Bernanke a évoqué devant la presse la possibilité d'un ralentissement, dès l'automne, des achats d'obligations du Trésor et des titres adossés à des créances hypothécaires que la Fed fait à hauteur de 45 et 40 milliards par mois, respectivement. Le taux de chômage était de 8,1% quand la DQ3 a été lancée; il est désormais de 7,6%.

La Fed estimait qu'il devrait être «dans le voisinage de 7%», dans un an, moment où elle prévoyait mettre fin à la DQ3 après quelques réductions de son rythme d'achats. M. Bernanke a répété à maintes reprises qu'il ne s'agissait pas là d'un scénario immuable, mais plutôt dicté par les données qui montraient jusque-là une certaine amélioration de l'emploi et du marché de l'habitation. La détente pourrait même être relancée de plus belle, advenant une détérioration de la conjoncture, avait expliqué M. Bernanke.

Les perspectives d'une accélération marquée de la croissance durant le deuxième semestre se sont quelque peu assombries ces derniers jours avec le retour prochain à l'avant-scène du dysfonctionnement du Congrès.

La semaine dernière, les républicains ont annoncé qu'ils allaient exiger d'importantes coupes budgétaires en échange de leur accord à un relèvement du plafond de la dette, fixé depuis 2 ans à 16 400 milliards de dollars. Les démocrates ne veulent rien entendre de nouvelles coupes qui ne soient assorties d'une réforme fiscale.

Bref, la fermeture des activités gouvernementales en septembre ou en octobre est plausible et de nature à freiner à nouveau embauches et investissements, un peu comme la perspective du mur budgétaire l'avait fait l'automne dernier.

Voilà qui milite pour la prudence de la part du Comité de politique monétaire de la Fed. D'autant plus que c'est seulement à leur réunion du 18 septembre que ses membres auront à faire part de leurs prévisions quant à un premier relèvement du taux directeur, à la croissance, aux taux de chômage et d'inflation pour 2013, 2014 et 2015.

À la mi-septembre, on aura aussi une meilleure idée de celui ou celle qui présidera la Fed à compter de janvier. Il n'est pas acquis que M. Bernanke sollicite un troisième mandat.

Le président Barack Obama a déjà laissé entendre son penchant pour l'économiste nobélisé Larry Summers, tandis qu'une majorité de démocrates élus poussent la candidature de Janet Yellen, déjà vice-présidente du Bureau des gouverneurs de la Fed. Le mandat de M. Bernanke prend fin le 31 janvier.