Le premier ministre conservateur grec Antonis Samaras, sous pression, a proposé vendredi de rouvrir partiellement la radio-télévision publique grecque, dont la fermeture brutale mardi soir a suscité un tollé en Grèce et à l'étranger.

«Une commission temporaire bénéficiant d'un large soutien des partis (politiques) peut être nommée pour engager un petit nombre d'employés afin que la diffusion de programmes d'information puisse reprendre immédiatement», a déclaré M. Samaras dans un communiqué, publié au quatrième jour de manifestations devant le siège de la radio-télévision publique ERT.

Après le désaccord ouvert de ses partenaires gouvernementaux, les socialistes du Pasok et de la gauche modérée (Dimar), M. Samaras est contraint de trouver une solution «commune» dans les prochains jours. Une réunion est prévue lundi entre les trois dirigeants de la coalition.

Selon une source gouvernementale, le but de cette rencontre est de rétablir «le langage commun» entre les trois formations politiques et «trouver une solution commune». «Cela est faisable car l'objectif des trois partenaires est une télévision indépendante sans les dysfonctionnements qui pesaient sur l'ERT».

Pasok et Dimar réclament l'annulation de l'acte législatif portant seulement les signatures de M. Samaras et du ministre des Finances Yannis Stournaras, qui a entraîné l'interruption des programmes de l'ERT mardi soir et l'extinction du signal par des forces de l'ordre.

Le président de l'Union européenne de radiotélévision (UER), Jean-Paul Philippot, venu spécialement à Athènes, a demandé vendredi au gouvernement grec «de revenir sur sa décision» de fermer la radiotélévision publique ERT et de «rétablir son signal».

Le président de l'UER, une alliance de 56 médias de service public en Europe et alentour, a annoncé la remise à M. Stournaras d'une lettre en ce sens, «signée par 51 directeurs de chaînes et radios publiques européennes» .

Répondant à une question vendredi au parlement d'Alexis Tsipras, chef de la Gauche radicale Syriza, qui avait qualifié «de coup d'État» la fermeture, M. Stournaras a assuré qu'il ne s'agissait pas de fermer la radio-télévision publique «mais de la restructurer» en créant une nouvelle station cette fois sans «dysfonctionnement».

Le ministre faisait allusion au projet de loi présenté mercredi par le porte-parole du gouvernement Simos Kédikoglou, visant à la création «d'une nouvelle télévision, internet et radio», appelée Nerit avec 1200 employés, contre 2700 de l'ERT qui seront licenciés.

La Grèce s'est engagée auprès de ses créanciers, zone euro et FMI, à restructurer son service public afin de réduire ses déficits et à se séparer de milliers de fonctionnaires d'ici fin 2014, dont 2000 au début de l'été 2013.

Pour l'analyste politique Thomas Gérakis, «ce qui est le plus important maintenant pour apaiser le climat c'est que les gens ne continuent pas de voir un écran noir sur leurs postes». «Le gouvernement doit trouver une solution, faire en sorte de rouvrir l'ERT avec un service minimum», a-t-il souligné dans un entretien avec l'AFP.

Pour la quatrième journée consécutive, des centaines d'employés poursuivaient l'occupation du siège de l'ERT à Athènes où des journalistes continuaient de produire des programmes concernant surtout les manifestations de soutien, retransmis en direct sur des sites internet et grâce au signal analogique de l'UER.

Une grande affiche à l'entrée du bâtiment présentait un écran noir avec l'inscription «Democracy? No signal».

«Nous allons continuer l'occupation jusqu'à la réouverture de l'ERT», a indiqué à l'AFP Nikos Tsimpidas, un représentant du syndicat des employés de la radio-télévision publique.

Dans d'autres villes de Grèce, les locaux de l'ERT étaient occupés par des employés tandis qu'un concert était organisé dans l'après-midi sur la place Syntagma d'Athènes, devant le Parlement, avec la participation de plusieurs artistes grecs.

Qualifiant la radio-télévision publique de «foyer de privilèges, d'opacité et de gaspillage», M. Samaras s'est lancé dans un bras de fer avec l'ERT après des mois d'arrêts de travail des employés de la station, qui n'ont pas permis, selon lui, «une couverture» suffisante de ses déplacements à l'étranger ou ses rencontres à Athènes avec ses homologues européens.

Mais les syndicats ripostent en affirmant que M. Samaras, lors de la prise du pouvoir il y a un an, a nommé une nouvelle direction à la tête de l'ERT et embauché plusieurs employés, en continuant la politique «de clientélisme» suivie par les gouvernements précédents depuis des décennies.