Les opposants à l'achat d'Astral par Bell n'ont pas ressuscité la coalition « Dites non à Bell », mais Cogeco et Québecor tenteront tout de même de convaincre le CRTC de bloquer une deuxième fois la transaction. S'ils n'y arrivent pas, Québecor suggère au CRTC d'interdire à Bell-Astral d'acheter une chaîne généraliste francophone (en l'occurrence V) et de signer des ententes de droits multiplateformes dans les deux langues.

Québecor demande au CRTC de bloquer la transaction au motif que Bell-Astral « jouerait [...] d'une position nettement dominante », soulignant « qu'aucun autre groupe ne serait de taille pour réellement concurrencer BCE-Astral quand viendrait le temps de se porter acquéreur de contenus télévisuels ».

Mais si le CRTC devait approuver la transaction, Québecor lui suggère de poser une série de conditions: fin de la protection des genres dont bénéficie une demi-douzaine de chaînes spécialisées d'Astral (dont Super Écran), interdiction d'acheter une chaîne généraliste francophone (en l'occurrence V, qui appartient à la famille Rémillard) et interdiction de signer des ententes de droits multiplateformes dans les deux langues.

De son côté, Cogeco ne propose pas de solution alternative au CRTC. Selon Cogeco, l'acquisition d'Astral donnera à Bell « un pouvoir sans précédent dans le marché qui ne pourra pas être contraint par des garanties réglementaires ».

Les entreprises, associations et citoyens avaient jusqu'à 20h vendredi pour exprimer leur point de vue sur la transaction au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications (CRTC), qui rendra publiques les dernières interventions sur son site web lundi matin.

Environ 735 interventions avaient déjà été rendues publiques vendredi après-midi, mais les interventions des grandes entreprises sont généralement déposées à l'heure limite et ne sont disponibles que le prochain jour ouvrable. La transaction Bell-Astral a obtenu l'approbation du Bureau de la concurrence au début mars, mais il lui reste à obtenir l'aval du CRTC, qui tiendra des audiences publiques la semaine du 6 mai à Montréal.

Comme la première fois, Cogeco, Telus et Québecor s'opposeront à la transaction, qui prévoit cette fois-ci la vente de 12 des 25 chaînes de télé d'Astral (en plus des 10 stations de locales que devaient être vendues de toute façon en raison des règles de propriété commune du CRTC).

« Il y aura moins de distractions, mais les préoccupations seront les mêmes, dit Ann Mainville-Neeson, directrice des affaires réglementaires de Telus, en entrevue à La Presse Affaires. L'intégration verticale a des conséquences à long terme pour tout le secteur des télécoms, et les mesures de protection actuelles du CRTC ne sont pas suffisantes. » Telus n'est pas rassurée par les garanties obtenues par le Bureau de la concurrence. « Elles ne touchent que la télé traditionnelle et les pratiques anticoncurrentielles ont plus de chance de se produire dans le digital, dit Ann Mainville-Neeson. Le Bureau de la concurrence a manqué le bateau. »

Corus et Groupe de communications Square Victoria (propriétaire de La Presse par le biais de Gesca) appuieront à nouveau la transaction. Corus a un intérêt particulier cette fois-ci : l'entreprise albertaine achète de Bell-Astral sept chaînes de télé détenues en copropriété et deux stations de radio pour 400 millions de dollars.

Rogers (en désaccord la première fois) et Shaw (en faveur la première fois) attendront lundi avant de faire connaître leur position. Idem pour les organismes de défense des consommateurs Option consommateurs et le Centre pour la défense de l'intérêt public (PIAC), qui s'étaient opposés à la transaction l'automne dernier.

Bell s'attend-elle à des audiences publiques moins mouvementées? « Nous verrons, a dit Mirko Bibic, chef des affaires réglementaires de Bell, en entrevue le mois dernier. Nous voulons démontrer au CRTC que la transaction apportera des bénéfices tangibles pour les consommateurs et des investissements dans notre écosystème. »

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Bell-Astral II

En faveur:

Corus

Groupe de communications Square Victoria (La Presse)

En désaccord:

Québecor

Cogeco

Telus