En un sens, le huard a connu une semaine parfaite: cinq reculs d'affilée face au billet vert. Il vaut désormais moins de 98 cents US et pourrait baisser encore.

En principe, cela devrait avoir l'heur de plaire aux exportateurs. En pratique ce ne sera pas le cas. À court terme du moins.

C'est la pluie de mauvaises nouvelles économiques des deux côtés de la frontière qui affaiblit notre monnaie ces jours-ci

La plongée étonnante de 2,1% des ventes des détaillants en décembre, annoncée hier par Statistique Canada, aura eu l'effet d'une douche froide sur les marchés, déjà angoissés par la plongée des mises en chantier en janvier aux États-Unis aussi, par le psychodrame qui se dessine au Congrès durant la semaine prochaine et par la baisse des volumes de ventes des grossistes canadiens.

On s'attendait à un repli d'environ 0,3% seulement des ventes des détaillants, sur la foi de la contre-performance déjà connue de celles des concessionnaires de véhicules qui représentent grosso modo le quart du chiffre d'affaires des marchands.

Les replis étaient généralisés.

Les optimistes peuvent faire valoir que les chiffres de novembre avaient été particulièrement forts à cause des soldes du Black Friday et du lancement d'une nouvelle mouture du téléphone intelligent d'Apple. Décembre représente alors pour eux une correction normale.

Ils peuvent aussi noter que la popularité des cartes-cadeaux a peut-être faussé les chiffres de décembre. Ces cartes ne se transforment en ventes qu'au moment de leur utilisation, ce qui permet d'espérer qu'un joli rebond se soit produit le mois dernier. Janvier pourrait alors marquer un redressement.

Mince consolation, l'affaiblissement du huard va ralentir les achats transfrontaliers nourris depuis l'été par le relèvement du plafond d'achats sans tarifs douaniers.

Reste que le consommateur canadien est endetté, que le rythme d'embauche ralentit. Cela n'attire pas les gens dans les magasins, au moment où les détaillants doivent se préparer à affronter l'arrivée de gosses chaînes américaines comme Target dès le mois prochain.

Cette nouvelle concurrence va réduire leurs marges de profits et ralentir l'inflation.

Les chiffres de l'indice des prix à la consommation montrent d'ailleurs un repli désaisonnalisé de 0,1% de décembre à janvier, portant le taux annuel d'inflation à 0,5%. Il s'agit du taux le plus faible depuis octobre 2009. Il compromet toute possibilité que la Banque du Canada normalise son taux directeur avant plusieurs trimestres.

L'augmentation du coût de la vie est bien plus faible au Canada qu'aux États-Unis ou dans la zone euro. Pourtant les capacités de production inutilisées y sont bien plus grandes que chez nous.

Elles auront quand même augmenté au Canada durant l'automne où l'expansion aura été contenue à moins de 1% pour un deuxième trimestre d'affilée.

Si cette croissance reste la plus forte du G7, elle est trop faible pour soutenir une monnaie surévaluée depuis plusieurs mois.