En débarquant sur le plancher de l'entreprise Écolopharm, à Chambly, on se demande si ses dirigeants n'ont pas perdu la tête. Dans un ballet mécanique qui se déroule à toute vitesse, trois machines robotisées transforment des granules de polypropylène en fioles de plastique destinées à contenir des médicaments.

De ces fioles, il en sort des quantités astronomiques. Pas moins d'un million... par jour! Où diable écouler un tel volume? Sur le marché canadien, qu'Écolopharm a percé en un temps record. En deux ans et demi, l'entreprise de 14 employés s'est emparée de 25% des parts du marché québécois et de 12% du marché canadien des fioles pharmaceutiques, selon ses dirigeants.

«Au Canada, on est en train de négocier avec un autre très gros partenaire qui nous permettrait d'augmenter encore de 50% notre volume de production. Et on veut entrer sur le marché américain avec beaucoup plus de capacité», dit Sandrine Milante, première vice-présidente de l'entreprise.

L'engouement pour les petites fioles d'Écolopharm tient en un mot: l'écologie. L'entreprise affirme avoir été la première à commercialiser des fioles entièrement recyclables, forçant ses concurrents à s'adapter. Et elle a d'autres arguments environnementaux à faire valoir.

Écolopharm dit utiliser 55% moins d'électricité que ses concurrents, en plus de générer 53% moins de déchets et 55% moins de gaz à effet de serre.

«On ne vend pas des fioles de médicaments. On vend une opportunité pour les pharmaciens de dire qu'ils se préoccupent de la santé de la planète en plus de celle de leurs patients», dit Guy Gagnon, vice-président aux ventes et au développement des affaires de l'entreprise.

Des remords à l'action

Écolopharm est née d'une autre entreprise québécoise, Plastilec - une boîte fondée par les parents de Sandrine Milante et aujourd'hui dirigée par cette dernière. Plastilec fabrique des pièces de plastique pour une myriade de clients. Et pendant des années, elle a fabriqué en sous-traitance des fioles pharmaceutiques en polystyrène, un plastique non recyclable. «On en sortait d'énormes volumes chaque année, raconte Mme Milante. Mais avec un gros problème de conscience.»

À la fin des années 2000, Mme Milante décide qu'elle peut faire mieux. Des connaissances la mettent en contact avec Guy Gagnon, alors chef national des relations commerciales pour la multinationale pharmaceutique Abbott. L'idée de fabriquer des fioles écologiques le séduit et il décide d'embarquer.

«C'était tout un risque, raconte M. Gagnon. Je passais d'un poste de direction dans une entreprise de 75 000 employés à une start-up. Mais je l'ai fait parce que ça rejoignait mes fibres personnelles de développement durable.»

Aujourd'hui, deux ans et demi après le lancement de son produit, Écolopharm génère un chiffre d'affaires de quelques millions de dollars et a atteint le seuil de rentabilité. L'entreprise ne manque pas de projets. Elle veut lancer en 2013 le tout premier pilulier recyclable et souhaite devenir carbone neutre. Surtout, elle planifie une expansion américaine dès 2014. «On va évaluer l'empreinte carbone et voir s'il est préférable de s'installer aux États-Unis ou de centraliser la production ici, dit Sandrine Milante. Dans tous les cas, c'est clair qu'il faudra augmenter significativement notre capacité de production.»

«On est la seule entreprise à faire de l'innovation dans ce secteur d'activité, dit quant à lui Guy Gagnon. Les autres fabriquent la même fiole depuis des décennies. On pense que les arguments qui ont séduit les pharmacies canadiennes vont aussi fonctionner à l'étranger. D'ici cinq ans, l'objectif est clair: faire d'Écolopharm une multinationale.

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ÉCOLOPHARM

Qui

Les fondateurs Sandrine, Gaétan et Yvonne Milante et Guy Gagnon.

L'idée

Des fioles recyclables et écologiques pour contenir des médicaments.

L'ambition

Devenir une multinationale d'ici cinq ans en vendant des produits qui permettent aux pharmacies de réduire leur empreinte carbone.

Ils y croient et y ont misé de l'argent

L'entreprise Plastilec et la famille Milante.