Affaiblissement passager ou signe d'un déclin plus profond, l'action Apple a perdu plus de 20% en moins de deux mois, le groupe informatique semblant moins convaincre le marché après des initiatives maladroites et alors que ses parts de marché sont en baisse.

Le titre a encore perdu 3,63% jeudi, à 537,75 dollars. Le 19 septembre, avant le lancement de l'iPhone 5, il valait encore 702,10 dollars, son record à ce jour. Certains prédisaient alors une envolée jusqu'à 850 dollars. À la place, près de 150 milliards de dollars de capitalisation boursière ont disparu.

Apple voit toujours ses résultats financiers bondir. Les admirateurs font toujours la queue pour ses nouveaux produits. Mais la concurrence se fait sentir.

Au troisième trimestre, le téléphone intelligent le plus vendu au monde n'était plus un iPhone, mais le Galaxy S3 du rival sud-coréen Samsung, selon une étude publiée jeudi du cabinet de recherche Strategy Analytics.

D'après un autre cabinet, IDC, la part d'Apple sur ce marché a baissé au troisième trimestre à 14,9% contre 16,9% au deuxième, loin derrière Android, le logiciel de Google utilisé notamment par Samsung, qui fait fonctionner trois téléphones intelligents vendus sur quatre.

Dans les tablettes informatiques aussi, un marché qu'il avait créé en 2010 avec le premier iPad, la part de marché d'Apple est tombée de 65,5% au deuxième trimestre à 50,4% au troisième, selon IDC.

Samsung a doublé ses ventes et porté sa part de marché à 18,4%. Et le numéro trois, Amazon, s'adjuge 9% du marché avec son Kindle Fire, vendu pourtant seulement aux États-Unis.

Pour beaucoup d'analystes, c'est d'ailleurs le succès de tablettes plus petites et moins chères, comme le Kindle Fire, qui a poussé Apple, en un geste défensif, à lancer son iPad mini en octobre.

L'affaiblissement des ventes s'explique aussi par des reports d'achats avant le lancement de l'iPhone 5 et de l'iPad mini.

Tom Mainelli, directeur de recherche chez IDC, prévoit un meilleur quatrième trimestre pour l'iPad, mais prévient que «le prix de base relativement élevé du mini laisse beaucoup de place» à la concurrence.

Dans les téléphones intelligents, la victoire de Samsung est «probablement de courte durée», juge Neil Mawston, directeur exécutif de Strategy Analitics, qui s'attend «à ce que le nouvel iPhone 5 dépasse le Samsung Galaxy S3 au quatrième trimestre».

La demande est élevée pour l'appareil, lancé à un rythme plus rapide que d'ordinaire, mais les ventes sont pénalisées par des difficultés d'approvisionnement. L'un des grands sous-traitants d'Apple, le groupe taïwanais Foxconn, a confirmé mercredi qu'il n'arrivait pas à produire assez vite pour répondre aux commandes d'Apple.

Trip Chowdry, analyste chez Global Equities Research, évoque pour sa part «un changement profond dans la culture de l'entreprise» depuis le décès l'an dernier de son patron emblématique, Steve Jobs.

«Les investisseurs sont troublés, ils ont perdu confiance dans la direction», juge-t-il, estimant que Steve Jobs n'aurait pas fait l'erreur de laisser partir un «ingénieur brillant» comme Scott Forstall, vice-président chargé du système d'exploitation de l'iPhone et de l'iPad.

Son départ, annoncé fin octobre, est dû d'après la presse à son refus d'endosser publiquement la responsabilité du fiasco du système de cartographie du groupe, qui a entaché la réputation d'Apple.

Imposé sur la dernière version de l'iPhone en remplacement d'une application du concurrent Google, Apple Maps n'était clairement pas au point.

Pour d'autres analystes, le recul de l'action a des causes plus techniques. Apple représente «la plus grosse position de la plupart des fonds aux États-Unis et dans le monde», relève Grégori Volokhine, gérant de portefeuille chez Meeschaert New York. «Avoir trop d'une valeur qui baisse précipite la vente pour diminuer l'exposition. C'est un cercle vicieux».