Au moment où le ministère de la Santé et des Services sociaux et l'agence de publicité kbs+p lancent une campagne de sensibilisation à la dépression comme maladie, la firme Ipsos Reid dévoile les résultats d'un sondage confirmant la nécessité d'encadrer et détecter les cas d'épuisement professionnel (burn-out) et de dépressions en milieu de travail.

Plus d'un employé sur cinq dit souffrir de dépression actuellement et 16% des répondants admettent avoir déjà souffert d'un épisode de dépression. «Le pourcentage des diagnostics liés à la maladie mentale est de plus en plus important, dit Claude Di Stasio, vice-présidente, affaires québécoises de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Il est passé de 30% à 40% de 1996 à 2012.»

Florent Francoeur, de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, confirme la tendance. «Il y a 15 ans, 30% des absences étaient liées à la maladie mentale, note le PDG. Aujourd'hui, le pourcentage se situe entre 50% et 60%. La maladie mentale est le fléau de l'heure pour les organisations en Amérique du Nord. Leur budget médicament augmente de 10% par an. Par ailleurs, les antidépresseurs sont la deuxième catégorie de médicaments la plus vendue au Québec.»

Réalisé pour le compte du Centre pour la santé mentale en milieu de travail de la Great-West, le sondage d'Ipsos Reid met en lumière la situation des dirigeants d'entreprise face à la maladie. Plus de 80% des gestionnaires pensent qu'ils doivent intervenir auprès d'un employé présentant des symptômes de dépression et le tiers ont été formés sur la détresse psychologique, mais trop peu encore seraient bien outillés pour faire face à une telle situation (voir autre texte).

«Le Centre pour la santé mentale en milieu de travail a été créé en 2007, alors qu'on voyait une progression dans les réclamations d'invalidité, dit Mike Schwartz, vice-président prestations collectives de la Great-West. On voyait aussi les employeurs au prise avec des cas sans savoir quoi faire. On a décidé de donner de l'information aux employeurs pour qu'ils comprennent mieux la situation, pour augmenter les connaissances sur la maladie et les pousser à passer à l'action. Tout est sur l'internet. Vous n'avez pas besoin d'être un de nos clients pour avoir accès à l'information. Le Centre est accessible gratuitement.»

Les causes

Les causes expliquant la progression des cas détectés et des réclamations faites aux compagnies d'assurances sont multiples.

Récemment à Paris, Jean-Claude Delgènes, directeur du cabinet de prévention des risques professionnels Technologia, soulignait dans le cadre d'un colloque que «les exigences de la vie professionnelle sont de plus en plus fortes et qu'elles mettent les salariés sous pression».

La faute à quoi, à qui, selon lui? «Les nouvelles technologies de l'information, le chômage de masse qui dure, de nouvelles organisations du travail aggravées par l'exigence de rentabilité, des objectifs de moins en moins réalistes et une gouvernance non-respectueuse de l'humain.»

En France, certains plaident d'ailleurs pour que le burn-out soit reconnu comme une maladie professionnelle et pour que les directeurs des ressources humaines des entreprises mettent «un filet de protection autour des salariés en négociant des accords de prévention et en ouvrant le débat dans l'entreprise.»

---------------

LA DÉPRESSION ET LES ENTREPRISES

22%

Pourcentage de Canadiens qui déclarent souffrir de dépression.

33%

Proportion des gestionnaires qui ont reçu une formation pour intervenir dans les cas de dépression.

+ de 50%

Part des absences au travail liées à la maladie mentale.

Sources : Ipsos Reid ; Ordre des conseillers en ressources humaines agréés