Surendettés, les consommateurs canadiens ont fréquenté quand même les magasins en mai, profitant sans doute des économies qu'ils ont pu réaliser dans les stations-services en faisant le plein.

Pour la deuxième fois seulement cette année, la valeur des ventes de l'ensemble des détaillants a augmenté de 0,3% au cours du mois. Cette hausse atteint même 0,8% si on exclut les ventes des concessionnaires de véhicules et des stations-services, a indiqué hier Statistique Canada.

Exprimée en volume, la hausse générale atteint 0,7%. C'est la plus forte en huit mois, mais elle ne compense pas le recul de 0,8% enregistré en avril.

«La consommation restera sans doute molle au cours des prochains mois, puisque la croissance du crédit à la consommation [année sur année] est la plus faible en près de deux décennies et que le taux d'épargne est au plus bas depuis cinq ans», préviennent Matthieu Arseneau et Krishen Rangasamy, économistes à la Banque Nationale.

Les supermarchés, les magasins de vêtements, d'articles de sport, de produits culturels et de fournitures en tout genre ont attiré les consommateurs. Ils furent toutefois moins enclins à faire tinter les tiroirs-caisses des magasins d'appareils électroniques ou de produits de santé.

Les marchands qui avaient pignon sur rue en Alberta, en Saskatchewan ou à Terre-Neuve-et-Labrador ont eu de la veine avec des hausses de leur chiffre d'affaires supérieures à 1% dans l'ensemble.

En revanche, ceux du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard, du Manitoba et du Québec ont vu leurs affaires diminuer. Les détaillants du Québec connaissent des mois difficiles avec une hausse d'à peine 1,2% de leurs ventes depuis un an alors que la moyenne canadienne est de 3,1%. Cette hausse est propulsée par les consommateurs des trois provinces de l'Ouest.

Au Québec, il est bien possible que la deuxième augmentation de la taxe provinciale de vente en deux ans incite les consommateurs à réapprécier les vertus de l'épargne ou à concentrer leurs achats d'importance dans les magasins au sud de la frontière.

Faible croissance

«Les ventes des détaillants canadiens font du surplace depuis le début de 2012. Les ménages sont aux prises avec une faible croissance de leurs revenus des hausses de taxes [dans certaines provinces] et un fort endettement, note Douglas Porter, économiste en chef désigné chez BMO Marchés des capitaux. Il est difficile de concevoir que les ventes des détaillants puissent prendre de l'essor en deuxième moitié d'année.»

La stagnation au Canada reste moins mauvaise toutefois qu'une baisse franche comme celle que connaissent les marchands américains dans leur ensemble.

La force relative des ventes des détaillants canadiens en mai, jumelées à celles des grossistes et des manufacturiers, est de bon augure pour la variation réelle du produit intérieur brut.

Plusieurs prévisionnistes s'attendent à une expansion de la production de l'ordre de 0,2% qui s'ajoute à celle de 0,3% enregistrée en avril.

Pour le trimestre, la contribution des dépenses de consommation à la croissance sera au mieux nulle. «En présumant que les ventes ont stagné en juin, nous nous attendons à une contraction annualisée de 1,4% des ventes des détaillants au deuxième trimestre», calcule Derek Holt, économiste principal chez Scotia Capitaux.

Évidemment, la contribution des dépenses des ménages pourrait être un peu plus élevée s'ils ont dépensé davantage pour des services en tout genre.

Au premier trimestre, les dépenses de consommation ont progressé de 0,9% sur celles de l'automne, ce qui marquait déjà un fort ralentissement. En 2011, les dépenses des ménages augmentaient en moyenne de 2% par trimestre, en rythme annuel.