La Chine a annoncé jeudi sa deuxième baisse de taux d'intérêt en un mois pour répondre à une croissance qui ralentit, une mesure qui a surpris les analystes et leur fait craindre l'annonce d'indicateurs économiques plus mauvais que prévu la semaine prochaine.

Après avoir baissé le 8 juin les taux d'intérêt de référence pour la première fois depuis décembre 2008, la banque centrale est intervenue de nouveau pour stimuler la demande alors que les exportateurs chinois souffrent de la crise en Europe et que la demande intérieure peine à prendre le relais.

À compter de vendredi, le taux d'emprunt à un an baisse de 0,31 point de pourcentage à 6% tandis que la rémunération de dépôts à un an a également été revue à la baisse de 0,25 point de pourcentage, pour tomber à 3%.

De plus les banques commerciales pourront accorder jusqu'à 30% de rabais par rapport aux taux d'emprunt de référence, contre 20% jusqu'ici, ce qui augmente la concurrence que peuvent se livrer les établissements bancaires pour attirer des clients.

Cette annonce intervient sur fond de croissance fortement ralentie en Chine. Le produit intérieur brut (PIB) a augmenté de 8,1% au premier trimestre, contre 9,2% en 2011. Et le chiffre de la croissance pour le deuxième trimestre, qui sera annoncé le 13 juillet, devrait être inférieur à celui du premier, selon les analystes.

La baisse de l'inflation offre d'autre part de la marge de manoeuvre au gouvernement pour assouplir sa politique monétaire.

Le cabinet Capital Economics estime que la hausse des prix à la consommation en juin, qui doit être annoncée lundi par le gouvernement, devrait tomber à 2% en rythme annuel.

La nouvelle baisse des taux «va plus loin que ce qui était attendu de la part des dirigeants» chinois, a commenté Mark Williams, chef économiste de Capital Economics pour l'Asie-Pacifique.

«Beaucoup s'attendaient à une baisse prochaine des réserves obligatoires des banques» pour leur permettre de prêter davantage, mais une baisse des taux d'intérêt n'était pas attendue avant fin juillet, selon lui.

Une explication est que les dirigeants chinois «ont pu jeter un oeil avant tout le monde sur les indicateurs du mois de juin et n'ont pas aimé ce qu'ils ont vu», selon M. Williams.

«La baisse des taux est certainement une bonne nouvelle pour les marchés, mais les investisseurs peuvent se demander si les indicateurs pour le mois de juin et le deuxième trimestre qui doivent être publiés dans la semaine à venir ne seront pas pires que prévu», a également réagi Lu Ting, un analyste de Bank of America - Merrill Lynch basé à Hong Kong.

La dernière baisse des taux n'avait pas suffi à stimuler suffisamment la demande de prêts bancaires des entreprises, juge Andrew Polk, économiste de The Conference Board basé à Pékin.

«La demande de prêts a diminué de manière plus prononcée que ce qu'avaient anticipé les autorités», a déclaré à l'AFP M. Polk, qui souligne le caractère inhabituel d'une telle situation en Chine où l'offre de crédit était jusqu'à récemment entièrement absorbée par le marché, mais limitée par le gouvernement pour lutter contre l'inflation.

Cette faiblesse de la demande signale un endettement élevé de certaines entreprises, selon lui.

«Les entreprises d'État se plaignent que les banques aient maintenu des marges importantes au moment où leurs revenus diminuent», c'est pourquoi la baisse des taux peut être vue comme une «redistribution des profits en faveur des entreprises d'État», relève pour sa part Andy Xie, un économiste indépendant basé à Shanghai.