Après avoir imposé une loi spéciale forçant les grévistes du Canadien Pacifique à retourner au travail, les conservateurs souhaitent que les syndiqués se remettent au boulot de leur propre chef, sans attendre la sanction royale pour C-39.

La ministre fédérale du Travail, Lisa Raitt, juge que le processus législatif entourant son projet de loi prend trop de temps. Elle pointe du doigt les sénateurs libéraux, qui feraient à son avis traîner les choses.

Mme Raitt demande donc aux 4800 mécaniciens et chefs de train en grève depuis la semaine dernière de volontairement remettre les trains en marche.

«C'est toujours entre les mains des parties de retourner au travail», a suggéré la ministre mercredi.

«Je demande au CP et aux Teamsters de retourner volontairement au travail vendredi, sachant qu'ils doivent remettre le service opérationnel», a-t-elle déclaré après la période de questions aux Communes.

Elle a même demandé à ce que le chef de l'opposition officielle Thomas Mulcair exprime lui aussi cette demande au syndicat, un voeu qui a été rejeté du revers de la main par les néo-démocrates.

«Je ne sais pas dans quel univers vit la ministre, alors qu'elle-même a empoisonné le bon fonctionnement des négociations. Et elle demande maintenant au syndicat, qui vient de voir ses droits bafoués, de retourner à la table en prétendant que l'employeur négociera de bonne foi», s'est indigné le leader en Chambre du NPD, Nathan Cullen.

Le syndicat des Teamsters n'était pas disponible pour commenter immédiatement les propos de la ministre.

Sénat

Il y a fort à parier que ce sera vendredi que les trains se remettront en marche, de toute façon.

Après l'adoption à toute vitesse dans la nuit de mercredi du projet de loi spécial mettant fin à la grève du CP, C-39 se retrouve maintenant  aux portes du Sénat.

Mais les sénateurs libéraux veulent avoir le temps de convoquer des témoins afin d'étudier le projet de loi décrié par le syndicat des Teamsters, représentant les 4800 mécaniciens et chefs de train en grève depuis la semaine dernière.

«Nous voulons nous assurer que les témoins puissent témoigner et que les gens puissent avoir leur mot à dire, mais il n'y a pas de désir de notre part d'imposer un délai», a spécifié le chef libéral Bob Rae.

Les procédures prévoient un préavis de 48 heures avant que la Chambre haute ne débatte d'un projet de loi. Les libéraux n'entendent pas demander tout ce préavis, mais veulent néanmoins attendre à jeudi avant de débattre - et probablement voter - sur C-39.

Cette prise de position a mis en rogne la ministre Raitt, qui aurait aimé que les sénateurs se penchent sur-le-champ sur le projet de loi adopté la nuit précédente aux Communes. De cette façon, les trains de marchandises auraient pu se remettre à transporter des céréales, du charbon et d'autres produits à travers le pays à compter de jeudi.

«L'horloge tourne», a dit la ministre à la sortie du caucus conservateur plus tôt dans la journée.

«Ces sénateurs, qui ont décidé qu'ils ne nous aideraient pas avec la législation de retour au travail, auront sur leur conscience les effets que cela produit sur l'économie tous les jours», a-t-elle ajouté.

Le gouvernement Harper soutient que la paralysie des services de transport du CP entraînait des pertes d'un demi-milliard de dollars par semaine.

Une fois le vote au Sénat complété, la projet de loi doit obtenir la sanction royale du gouverneur général du Canada. Le projet de loi C-39 prévoit ensuite un laps de 12 heures avant que les trains se remettent en marche.

Selon la leader du gouvernement au Sénat, Marjory LeBreton, la décision des sénateurs libéraux d'attendre à jeudi avant de débattre du projet de loi est d'autant plus désolante qu'il est, selon elle, dans la tradition de la Chambre haute d'adopter les lois de retour au travail immédiatement.

«Il s'agit d'une tradition de longue date, qui a été suivie par les deux gouvernements (libéral et conservateur)», a-t-elle avancé.