RIM, fabricant canadien du téléphone intelligent BlackBerry, disparaîtra rapidement s'il ne trouve pas de partenaire et n'adopte pas de nouvelle stratégie, estiment mercredi des analystes alors que le groupe vient de charger deux banques de le conseiller sur sa stratégie financière.

Pour Carl Simard, président de la société canadienne de gestion de portefeuille Medici, il est «minuit moins deux» pour Research in Motion, qui doit adopter une nouvelle stratégie et accepter de devenir un «joueur de créneau» plutôt que «continuer à rêver de concurrencer Apple», après avoir fait «l'erreur monumentale» d'engager ses ressources dans la tablette Playbook.

Roberta Cozza, analyste au cabinet spécialisé Gartner, est du même avis: RIM risque fort de devenir un «acteur de niche» sur le marché et ses perspectives pour 2012 sont «très difficiles», a-t-elle dit à l'AFP.

Même si le lancement de la nouvelle plate-forme BlackBerry 10, plus tard dans l'année, est un succès, il sera dépassé par l'apparition du nouvel iPhone et de nouvelles versions de Samsung sous Android, selon Mme Cozza.

Comme bien d'autres experts, M. Simard interprète la décision de RIM de se faire conseiller par JPMorgan Chase et RBC Capital Markets comme une annonce qu'il cherche un repreneur pour se repositionner.

«Si c'était pour choisir une nouvelle stratégie, ils auraient pris des consultants» et non des spécialistes du marché des capitaux, explique-t-il à l'AFP.

«C'est une lumière au bout du tunnel», estime-t-il, alors que pour le moment RIM «perd des marchés à vue d'oeil».

Effectivement, selon le cabinet spécialisé IDC, les téléphones multifonctions exploitant le système Android occupaient 59% du marché mondial au premier trimestre 2012, et l'iPhone en prenait 23%, laissant à BlackBerry 6,4%, contre 13,6% un an plus tôt.

Le BlackBerry 10, prochaine version du téléphone intelligent, a peu de chances de sauver RIM car, à cause de la force commerciale d'Apple et d'Androïd, même ses clients «purs et durs» s'éloignent. Research in Motion «devrait croître car le marché croît, mais c'est une compagnie qui décroît», dit M. Simard.

Même le point fort du BlackBerry, la sécurité de son réseau, perd de sa valeur, selon l'analyste canadien. «Il y a quelques années ils avaient réussi à monnayer leur fameux réseau sécuritaire mais aujourd'hui ils sont incapables de le faire, de concurrencer Android ou Apple», estime-t-il. «Il faut qu'ils se vendent à une autre société qui a de l'argent et les aide à définir une nouvelle stratégie».

RIM survivra encore deux ou trois ans, puis sera en danger de disparition, prédit-il.

Le commentateur américain des technologies Shelley Palmer est plus pessimiste. Pour lui, BlackBerry est déjà «mort», car il est incompatible avec les applications de Google. Pour ressusciter, BlackBerry devrait «se réinventer», ajoute-t-il.

C'est aussi l'avis de la chroniqueuse économique du quotidien montréalais La Presse, Sophie Cousineau, qui avance deux hypothèses: scinder l'entreprise en deux avec le fabricant de téléphones d'un côté et la société de services informatiques de l'autre, ou s'associer à un partenaire et offrir son nouveau système d'exploitation sous licence.

Ce partenaire, pense-t-elle, pourrait être Facebook qui envisage de lancer son propre appareil sans fil et pour qui l'achat de RIM serait un «formidable raccourci» et en même temps un «cauchemar d'intégration».

Pour l'analyste du site 247Wallst.com Douglas McIntyre, RIM ne peut être vendu, car personne ne voudrait l'acheter.