Un nouveau fonds de capital de risque de 150 millions de dollars a été lancé hier à Montréal. Le fonds sera géré par l'allemand TVM Capital à partir de Montréal et compte parmi ses investisseurs la pharmaceutique Eli Lilly, qui en profite pour ouvrir localement un bureau d'une de ses filiales spécialisées dans le développement de médicaments.

Le fonds de fonds Teralys Capital y injecte 65 millions. BDC Capital, Fondaction CSN et Adventus Capital Management, filiale de Minnesota Life Insurance Company, figurent aussi au nombre des partenaires financiers.

Ce nouveau fonds, qui avait été annoncé en primeur par La Presse Affaires le 16 mars dernier, investira principalement dans les biotechs qui développent un seul médicament ou qui ont découvert une molécule. L'objectif est d'amener la biotech à la phase 2A des études cliniques, là où une preuve d'efficacité dans le traitement d'une maladie est démontrée chez les humains.

Le lancement d'un fonds de 150 millions est fort bienvenu dans un domaine où le manque de capitaux se fait cruellement sentir partout dans le monde. De plus, le fonds TVM est conçu en fonction du nouveau modèle d'affaires en vigueur dans le domaine pharmaceutique en misant, comme il le fait, sur les réseaux internationaux de partenaires stratégiques.

On l'a vécu à Montréal récemment, les grandes pharmaceutiques sabrent leurs propres infrastructures de recherche et préfèrent sous-traiter leurs travaux et tisser des alliances.

La force du fonds, selon Jacques Bernier, associé principal chez Teralys Capital, est qu'il possède assez d'argent pour agir seul. «Le financement complet du projet est disponible au jour un. On n'a pas à compter sur une syndication avec plusieurs partenaires ou à faire de multiples rondes de financement en cours de route pour se rendre à la première étape de preuve de concept. Le retour pécuniaire pour le chercheur est plus évident», a-t-il dit après la conférence de presse annonçant la création du fonds TVM Capital science de la vie.

Disposant de 700 millions à investir dans les TI, les sciences de la vie et les technologies propres, Teralys a été créé par la Caisse de dépôt, le fonds FTQ et Investissement Québec.

Par le passé, a rappelé M. Bernier, il fallait de 15 à 20 millions pour amener une molécule à la phase 2A. Le chercheur-entrepreneur assistait à la dilution de son avoir au gré de rondes de financement qui se succédaient. Il devait aussi consacrer énormément d'énergie à amasser des fonds.

Avec le modèle mis en place par le nouveau fonds, il faut la moitié moins d'argent, soit de 7 à 10 millions, dit-il. D'ici cinq ans, TVM veut investir 150 millions dans 15 entreprises, la majorité au Québec.

«Une fois atteinte la preuve d'efficacité chez les humains, a précisé le Dr Hubert Birner, associé principal de TVM Capital, qui gérera le nouveau fonds à partir de Montréal, ces nouveaux traitements prometteurs seront vendus aux grandes entreprises pharmaceutiques, comme Lilly, qui ensuite les développeront commercialement dans divers marchés.»

Deux nouveaux sièges sociaux

TVM Capital est un fonds allemand spécialisé dans les sciences de la vie comptant 25 ans d'expérience. Trois personnes travailleront avec M. Birner au bureau montréalais de TVM pour commencer.

Du côté d'Eli Lilly, qui mettra 20% du capital dans le nouveau fonds, on a annoncé l'ouverture d'un premier bureau au Canada, à Montréal, de Chorus, une filiale de Lilly qui travaille avec des organismes de recherche sous contrat (ORC). Jusqu'à 10 postes de haut niveau seront créés d'ici à la fin de 2013. Eli Lilly était auparavant absente du paysage montréalais.

Le responsable de l'ensemble du développement commercial, du capital-risque et des activités de gestion d'alliances chez Eli Lilly, l'Américain Darren Carroll, s'est déplacé à Montréal pour l'annonce. «Rendue à l'étape de la preuve d'efficacité de la molécule ou du médicament chez les humains, l'entreprise voit sa valeur bondir de façon dramatique, a expliqué M. Carroll, dans une interview. Comme partenaire stratégique du nouveau fonds, Chorus mettra toute l'expertise de son réseau mondial au service des start-up financés par TVM pour les aider à atteindre l'étape de la preuve d'efficacité dans le respect des plus hautes normes de l'industrie.»

M. Carroll a aussi évoqué la possibilité que Chorus accorde éventuellement des contrats aux nombreux ORC actifs à Montréal dans le but de tester d'autres molécules appartenant à Eli Lilly.

Riaz Bandali, président du développement du secteur des premières phases chez PharmaNet, ORC employant 500 personnes au Québec, s'est réjoui de l'annonce d'hier. «La bonne nouvelle est qu'un fonds consacre de l'argent aux sciences de la vie. C'était attendu depuis très longtemps», a-t-il dit, au téléphone.