L'accueil de Facebook à la Bourse ne pouvait être plus froid. Une avalanche de poursuites et d'enquêtes s'abat sur le réseau social, cinq jours après son premier appel public à l'épargne. Même si l'action de Facebook a repris 3% hier, clôturant à 32$US, le titre demeure 16% sous son prix d'émission de 38$US. Une grande déception pour cette émission tant attendue de 16 milliards US, la troisième plus importante de l'histoire américaine.

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Frustrés, différents groupes d'investisseurs ont entrepris, hier, des recours collectifs contre Facebook, ses dirigeants, les firmes de courtage qui ont participé à l'émission, ainsi que la Bourse NASDAQ.

«C'est une entrée en Bourse qui est assez désastreuse, surtout avec toute la visibilité que cette émission-là avait sur les marchés. Tout le monde sort avec un oeil au beurre noir, autant Facebook que les courtiers, principalement Morgan Stanley dont la réputation est amochée», a commenté Jean-René Adam, gestionnaire de portefeuille de marchés nord-américains chez Hexavest, à Montréal.

Le cabinet d'avocats Robbins Geller Rudman&Dowd LLP a déposé, hier, un recours collectif au tribunal fédéral de Manhattan au nom des investisseurs qui ont acheté les actions de Facebook dans le cadre de son inscription en Bourse le 18 mai.

Un autre recours collectif a été lancé par le cabinet Lieff Cabraser Heimann&Bernstein. Il vise Facebook, certains de ses dirigeants et administrateurs, ainsi que les courtiers qui ont piloté l'émission. On leur reproche d'avoir «préparé avec négligence» le prospectus qui a servi à vendre les actions de Facebook.

Mardi, un autre cabinet de Los Angeles, Glancy Binkow&Goldberg, avait déposé en Californie une poursuite au nom des investisseurs qui ont subi des pertes après avoir acheté des actions de Facebook jusqu'au 22 mai.

Ce recours intitulé Lazar c. Facebook vise plus particulièrement les trois grandes firmes de courtage qui ont participé à l'émission publique, soit Morgan Stanley, Goldman Sachs et JP Morgan Chase, ainsi que les dirigeants de Facebook.

Accusations graves

On accuse les courtiers d'avoir abaissé leurs prévisions de Facebook pour le deuxième trimestre et pour l'année 2012, durant la tournée de présentation de l'émission, sans en aviser le grand public. Seulement une poignée de grands investisseurs auraient été mis au parfum.

«Si elles sont vraies, ces allégations soulèvent des préoccupations réglementaires», a dit le chien de garde de l'industrie du courtage aux États-Unis, la Financial Industry Regulatory Authority, laissant entendre qu'il pourrait y avoir enquête. Même son de cloche du côté de la Securities and Exchange Commission (SEC).

Même le Congrès veut s'en mêler. La Commission bancaire du Sénat a annoncé qu'elle ferait une enquête informelle sur cette affaire.

Mais Morgan Stanley s'est défendu d'avoir mal agi. Et Facebook a répondu que les différentes poursuites visant son entrée en Bourse ratée étaient «infondées», précisant qu'il se défendrait «vigoureusement».

La Bourse NASDAQ a aussi été la cible d'une poursuite, hier. On l'accuse d'avoir «sérieusement mal géré» l'entrée en Bourse de Facebook. Plusieurs investisseurs ont subi des délais anormaux dans le traitement de leur transaction. D'autres ont carrément été incapables de faire annuler leur ordre d'achat lorsqu'ils ont senti que l'entrée en Bourse tournait au vinaigre.

Certains estiment que Facebook et les courtiers ont tout simplement été trop gourmands, en relevant le prix et la taille de l'émission quelques jours avant l'inscription. Facebook a gonflé de 25% le nombre d'actions émises, à 421 millions, et a relevé le prix de à 38$US, alors qu'on tablait d'abord sur une fourchette de 28 à 35$US.

D'autres cas

Plusieurs autres médias sociaux, comme Pandora et Groupon, ont profité de la frénésie entourant leur entrée en Bourse pour gonfler la taille et le prix de leur émission.

Aujourd'hui, l'action du site d'achats groupés Groupon vaut presque deux fois moins que son prix d'émission établi à 20$US en novembre dernier. Le titre de la radio en ligne Pandora, qui est entré en Bourse à 16$US pièce, est retombé à 10$US après avoir touché un sommet de 20$US.

Par contre, le site de réseautage d'affaires LinkedIn a connu un meilleur départ. Émis à 45$US il y a un an, le titre avait plus que doublé dès la première journée. Et il reste encore au-dessus de 100$US.