Au moment où SNC-Lavalin (T.SNC) essuie des remontrances de ses principaux actionnaires et que les analystes la disent vulnérable à une acquisition, un autre danger pourrait guetter l'entreprise: l'intensification du «maraudage» envers ses employés.

«Quand une entreprise rencontre des difficultés, les CV se mettent à circuler», souligne Louis Hébert, professeur à HEC Montréal et expert en stratégie d'entreprise.

Selon plusieurs analystes consultés par La Presse Affaires, les ingénieurs qualifiés sont particulièrement mobiles et les activités de recrutement sont déjà très présentes entre les firmes de génie-conseil.

«Les employés qui jugent que leur capital-actions ne s'appréciera pas dans les prochains mois sont particulièrement à risque de partir», croit M. Hébert.

L'expert croit que la question du maraudage est peut-être derrière la décision de la Caisse de dépôt et placement du Québec de voter pour la résolution sur la rémunération chez SNC, qui sera soumise aux actionnaires demain au cours de l'assemblée annuelle de l'entreprise.

La Caisse a en effet fait savoir lundi qu'elle votera pour la résolution malgré le «malaise» qu'elle éprouve à ce sujet.

«Notre objectif est simple: ne pas affaiblir SNC-Lavalin alors qu'elle traverse l'une des périodes les plus difficiles de son histoire», écrit la Caisse dans une lettre transmise lundi au président du conseil de SNC-Lavalin et signée par Marie Giguère, première vice-présidente aux affaires juridiques de la Caisse.

Bien payer ses dirigeants est encore la meilleure façon de les retenir, souligne Louis Hébert, de HEC Montréal.

«Davantage de transparence»

Le reste de la missive de la Caisse fait plutôt figure de remontrance. L'institution dit s'attendre à «davantage de transparence» de la part de SNC.

«[...] plusieurs de nos questions quant aux événements récents et aux nombreuses allégations faites au sujet de la société restent en suspens et nous tenons à vous exprimer notre malaise», peut-on lire.

Sans nommer expressément Pierre Duhaime, qui a quitté son poste dans la controverse avec une prime de 4,9 millions de dollars, la Caisse affirme s'interroger «sur les montants consentis à des membres de la haute direction alors que des enquêtes et des procédures juridiques sont toujours en cours».

En date du 31 décembre dernier, la Caisse était le deuxième actionnaire de SNC-Lavalin avec 5,9% des actions. Le premier actionnaire, Jarislowsky Fraser, a aussi accusé lundi le conseil d'administration de SNC d'avoir tenu une «discipline relâchée».

Plusieurs articles de journaux ont par ailleurs souligné hier que l'importante baisse de capitalisation boursière pourrait rendre SNC-Lavalin vulnérable aux acquisitions.

Des analystes interviewés par La Presse Affaires ont toutefois tempéré ces affirmations, affirmant que les offres hostiles sont rares en ingénierie et que les ententes négociées sont la norme.

«Les actifs de SNC, ce sont les cerveaux, et ils peuvent se braquer dans le cas d'une offre hostile», souligne Pierre Lacroix, analyste chez Desjardins.

L'action de SNC-Lavalin a connu un rebond important, hier, gagnant 1,38$, ou 3,7%, pour clôturer à 38,52$.